Nombreux furent les
Bretons dans notre région. Sur les bacs, aux chantiers du
Trait, la
centrale d'Yainville ou encore au Havre où ils auront
leur bagad. Enor d'hor mignoned vreizhat !
Une Bretonne en coiffe
à
Berville-sur-Seine ! Cette photo a été prise au
début du XXe
siècle. Il s'agit de Marie-Françoise
Périou, l'épouse de François-Marie Dunff, le
mécanicien du bac de Duclair.
Alors que la "marmotte" étaient encore portée par les
payannes des alentours, cette variété d'origine celtique
ne sera pas la première à se faire remarquer à
Berville. Il y aura aussi la femme d'Augustin Guyomard, lui aussi
chauffeur du bac.
Marie-Françoise était
née à Plougasnou, dans le Finistère.
Elle fut tôt orpheline. Son
père, marin, est mort noyé dans la Loire et son
corps ne fut jamais
retrouvé. Si bien que quand elle se maria, il lui fut
impossible de
produire un acte de décès et il fallut une
attestation du juge de
Paix.
Son époux,
François-Marie Deunff, a quant à lui perdu sa
mère à l'âge de 9
ans. Natif également de Plougasnou, il effectua son service
militaire dans la Royale où il fut matelot de 3e classe et
fusilier
breveté. Marié, marin de métier,
François-Marie eut à Plougasnou
deux premières filles de son épouse qui
était couturière.
Quel vent l'a poussé
jusqu'à nous ? Il a embarqué sur le bac de
Duclair le 16 décembre
1891 et sera mécanicien autorisé durant 23 ans
tout en restant
inscrit maritime à Morlaix. Marie-Françoise ne
semble pas avoir
suivi son mari car elle accouche à Plougasnou d'un fils,
Hervé, en
janvier 1893.

François-Marie Deunff semble
être le personnage à gauche, une main sur la
hanche...
Un
premier sauvetage
En août 1898, à Duclair
François-Marie Deunff révéla une
première fois son âme de
sauveteur. Ivres, deux journaliers, Joseph Questel et Buquet prirent
un bain de Seine et perdirent pied. Témoin, Deunff, le
chauffeur du
bac, plongea tout habillé et parvint à retirer
Buquet de l'eau.
Mais pas Questel dont le cadavre fut ramené par M. Testu,
pêcheur.
Il avait 25 ans, ses parents habitaient Canteleu.
On ne sait quand
Marie-Françoise vint vivre quelque temps à
Berville. Toujours
est-il qu'elle accoucha encore à Plougasnou le 20 mars 1904
1904.
Manifestement, le couple a vécu de longues
séparations. A titre
d'exemple. François-Marie débarque du bac le 15
janvier 1903. Il ne
réembarque que le 1er mars suivant. Largement le temps de se
rendre
à Plougasnou par le train pour y passer un mois.
En 1906, François-Marie
Deunff vivait seul chez une logeuse de Berville, la veuve Decaux,
née
Céléstine Rabuté. Le Breton partageait
cette location avec un
douanier, le sous-brigadier Micouin. Le bac était alors
commandé
par mon grand-oncle Gustave Mauger tandis que mon bisaïeul,
Pierre
Chéron, tenait le café du Quai.

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Marie-Françoise
Périou entourée de sa famille à
Kermébel. |
Hervé Deunff
photographié ici rue de Siam, à Brest. Breveté à Rochefort, il fut
second-maître pilote. |
Second acte de bravoure
François-Marie
était
encore attesté sur le bac en 1914. Quand la guerre
éclata. On ne le voit plus sur le bac de Duclair. Cependant,
dans la nuit du 30 juin au 1er juillet 1918, il se signale à
Rouen
durant
un bombardement en s'aidant d'une embarcation pour aller sauver un
novice dons le chaland venait d'être touché par
une bombe et qui
sombrait. Ce qui lui vaudra un témoignage officiel de
satisfaction.

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Marie-Françoise
et François-Marie sur la fin de leur vie... |
Puis
François-Marie
Deunff rentra au pays. Il est mort au hameau de
Kermebel,
à Plougasnou, en 1931. Avant lui, trois de ses enfants
étaient déjà décédés, tous
célibataires : deux filles et son fils, Hervé, qui fut
second-maître pilote. Mais les Deunff eurent descendance
par leur quatrième enfant. Epouse en secondes noces d'un certain
Alain
Broudic, la petite-fille des Deunff, dont l'ancêtre, nous l'avons
vu,
s'était
noyé, a tenu au Havre, quai de la Loire, le
restaurant de la Flotte. Cela ne s'invente pas...
Laurent
QUEVILLY.
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