Par Claudine Cardon-Hamet


Le funeste convoi du 6 juillet 1942 vers Auschwitz comptait plusieurs déportés originaires de notre région. Maurice Billard était du nombre. Récit...

 

Maurice Billard est né le 29 juillet 1900 au 226 rue des Pyrénées à Paris XXe. Il est le fils de Pauline Comte, 30 ans, ménagère, et de Jean Marc Billard, 30 ans, graveur, son époux. Maurice Billard habite au Trait au moment de son arrestation.
 
Il se marie avec Marie Eugénie Bass le 13 mars 1920, à Paris XIIIe. Il se remarie le 14 juin 1934 avec Madeleine Jeanne Hallier à Marly-le-Roy (Oise).

Le 15 juillet 1937 Maurice Billard est condamné à 2 mois de prison pour avoir été à l’initiative d’une manifestation, un soir de mars : il est à la tête d'une centaine d’habitants du Trait qui envahissent le jardin du couple Harel qui avec des amis chantaient des chants adventistes (journal du Trait).

Il travaille comme ouvrier métallurgiste au Trait au moment de son arrestation (selon Louis Eudier).

Maurice Billard est arrêté le 25 novembre 1940, 6 jours après René Demerseman (selon lui, "un copain arrêté le 21 novembre a parlé". Maurice Billard est interné à Rouen et jugé.
A la demande des autorités allemandes, Maurice Binard est transféré par la suite au camp allemand de Royallieu à Compiègne.

Maurice Billard est déporté à Auschwitz dans le convoi du 6 juillet 1942 dit des «45000». Ce convoi d’otages composé, pour l’essentiel, d’un millier de communistes (responsables politiques du parti et syndicalistes de la CGT) et d’une cinquantaine d’otages juifs (1170 hommes au moment de leur enregistrement à Auschwitz) faisait partie des mesures de représailles allemandes destinées à combattre, en France, les «Judéo-bolcheviks» responsables, aux yeux de Hitler, des actions armées organisées par le parti communiste clandestin contre des officiers et des soldats de la Wehrmacht, à partir d’août 1941.

On ignore son numéro d’immatriculation à son arrivée à Auschwitz le 8 juillet 1942. Le numéro «45249 ?» inscrit dans mes deux premiers ouvrages sur le convoi du 6 juillet 1942 (éditions de 1997 et 2000) correspondait à une tentative de reconstitution de la liste du convoi par matricules. Ce numéro, quoique plausible, ne saurait être considéré comme sûr en raison de l’existence de quatre listes alphabétiques successives, de la persistance de lacunes pour plus d’une dizaine de noms et d’incertitudes sur plusieurs centaines de numéros matricules. Seule la reconnaissance, par un membre de sa famille ou ami de la photo  d’immatriculation publiée ci-dessus pourrait désormais en fournir la preuve.
Maurice Billard meurt à Auschwitz le 15 septembre d’après le certificat de décès établi au camp d’Auschwitz et destiné à l’état civil de la municipalité d’Auschwitz (in Death Books from Auschwitz Tome 2 page 91). Selon le témoignage d’un rescapé il serait décédé accidentellement à Auschwitz, en tombant, «en fin d’année» (acte de décès du 14 avril 1947). L’acte du 5 octobre 1993 a modifié celle-ci en «15 septembre 1942». Son nom est inscrit sur le monument aux morts de la commune, près de l’Eglise, avec son deuxième prénom, Charles.



Sources
  • © Archives départementales en ligne de Paris
  • Liste de déportés de Seine-Maritime établies à son retour de déportation par Louis Eudier in «Notre combat de classe et de patriotes, 1934-1945» (annexes).
  • Liste de militants de la CGT fusillés ou déportés pour leur action dans la Résistance établie par la CGT de Seine Maritime.
  • Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 (basé essentiellement sur les registres - incomplets - de l’état civil de la ville d’Auschwitz ayant enregistré, entre le 27 juillet 1941 et le 31 décembre 1943, le décès des détenus immatriculés).
  • Fichier national du Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), Ministère de la Défense, Caen. Fiche individuelle consultée en octobre 1993.
  • © Site Internet «Mémorial-GenWeb».
  • Mail de M. Paul Bomartel (Le Trait). Décembre 2012
NOTA BENE
La biographie de Maurice Billard publiée sur le site de «Mémoire Vive» attribue à Maurice Billard des données biographiques qui concernent celles de Jean Binard d’Amfreville-la-Mivoie.

Claudine Cardon-Hamet est professeur agrégée et docteur en histoire. Dans ce très beau livre, né d'une thèse de doctorat, elle nous plonge à la fois dans une description minutieuse du fonctionnement du camp d'Auschwitz en 1942 et dans une histoire méconnue : la mise à mort d'un millier de communistes français… distincts, donc, de la population juive promise à la mort dans les chambres à gaz. Mais ne l'oublions pas, les aryens et les sbires d'Hitler souffraient alors d'une conspiration mondiale "judéo-bolchevique" ! Si ce texte de niveau universitaire brille par la qualité de ses analyses et la somme des documents fournis, il se distingue également par la profonde émotion qu'il pointe : celle d'un groupe d'hommes solidaires unis dans une ferveur commune, celle de l'idéal anti-fasciste. En mai 1945, 119 hommes seulement auront survécu à ce drame certainement rendu possible par la collaboration active de Vichy. Pour plus de renseignements sur les livres cliquer ici

En écrivant l'histoire du convoi Claudine Cardon-Hamet a pris le relais des premières recherches menées par Roger Arnould, déporté, résistant et ancien documentaliste de la Fédération Nationale des Internés Résistants et Patriotes.