Jumièges eut l'honneur de compter Charles-Juste Houël parmi ses propriétaires et électeurs. Mais qui était cet érudit ? Biographie...

Charles-Juste Houël, né à Rouen le 20 juillet 1787, était neveu du célèbre peintre du même nom, auteur du Voyage en Sicile et aux îles Lipari. Quant à son père, Nicolas-Laurent Houël, il fut nommé sous la Révolution pour arbitrer un conflit entre les habitants d'Heurteauville et les propriétaires de la harelle. Manifestement, cet avoué ne se contenta pas de jouer les justiciers. Car on retrouvera son fils parmi les possédants du marais d'Heurteauville...
Mais avant cela, au temps de sa jeunesse, Charle-Juste Houël est envoyé à Paris comme élève d'élite de l'école centrale du département de la Seine-Inférieure pour suivre les cours de l'Académie de législation. Il y eut d'éminants professeurs comme Lanjuinais.

Charles-Juste fut l'un des fondateurs de l'Athénée de législation, avec la plupart des jeunes avocats du barreau de Paris. Beaucoup ont rempli par la suite des rôles politiques.
L'oncle de Charles-Juste : Jean-Pierre Louis Laurent Houël, né le 28 juin 1735 à Rouen, mort le 14 novembre 1813 à Paris.
Vers la même époque il était admis par le concours au Conservatoire de musique et de déclamation. Dès lors il se lia avec plusieurs artistes distingués, entre autres avec Talma et Lafon, qui avaient été ses juges.

Impliqué dans la tourbière d'Heurteauville

Reçu avocat au barreau de Rouen en 1809, il allait y plaider près de vingt ans. Entre temps, en 1820, Charles-Juste Houël apparaît parmi les propriétaires de la harelle d'Heurteauville. Y possède-t-il maison ? Ce n'est pas en tout cas sa résidence principale. Le 13 avril 1828, au domicile de M. Hue de Rome, nouveau syndic et directeur de l'exploitation de la Harelle, tous ses copropriétaires  délibèrent sur l'organisation de leurs intérêts. La Harelle est en effet le cadre de litiges à répétition. Une commission de cinq membres est constituée pour vérifier les comptes du directeur de la Harelle. Elle comprend MM. Chantin cadet, François Boutard, exploitant de la grange dîmière et futur maire de Jumièges, Michel Varin, tous trois propriétaires et résidant à Heurteauville, enfin Casimir Caumont, propriétaire de l'abbaye et Juste Houël, propriétaires eux aussi mais ne résidant pas sur place. Juste Houël fut chargé de rédiger un précis sur l'origine, les titres et les réglements de cette propriété. Imprimé chez Baudry, cet opuscule de 32 pages est tiré à 200 exemplaires dont trois sur papier de couleur. Il n'est pas vendu dans le commerce. Pour réaliser son travail, Juste Houël a classé sept liasses de vieux  papiers de la manière suivante : Historique de la propriété, Administration, Rapports avec l'autorité départementale, Contentieux, Comptabilité, Propriété de la chapelle du Bout-du-Vent, Position industrielle. Ces papiers ont disparu depuis. 

Opposé à Charles X

Maître Houël était bâtonnier de l'ordre quand la révolution de juillet 1830 éclata. Il se prononça alors très énergiquement contre les ordonnances de Charles X, signa une consultation de résistance, convoqua son ordre pour protester et porta l'arrêté à la cour, à la tête du Conseil de discipline. 

La fermeté de son caractère et de ses opinions le mirent alors pendant quelque temps en évidence ; secrétaire de la commission municipale de Rouen, il rédigea pour le nouveau gouvernement le compte rendu des événements dans le département de la Seine-Inférieure, et fit partie de la députation envoyée de Rouen au roi Louis-Philippe.

Nommé à Louviers

Il n'obtint cependant alors de fonctions publiques auxquelles semblait l'appeler la sympathie très vive qu'il avait manifestée pour le nouveau gouvernement constitutionnel, que celle de président du tribunal civil de Louviers. Il en remplit les fonctions de 1830 à 1842. Plusieurs fois, il préside la commission administrative de cette ville. En 1841, on le compte toujours parmi les électeurs de Jumièges.

Une santé altérée le détermina à prendre alors sa retraite, et il ne s'occupa plus que d'études historiques et littéraires, un activité qui avait rythmé toute sa vie.

Son œuvre

En 1847, Houël met la dernière main à ses Annales des Cauchois, ouvrage en trois volumes sur l'histoire de la Haute-Normandie, auquel il a travaillé un grand nombre d'années et attaché un grand prix. 

Charles-Juste Houël a composé plusieurs notices historiques et archéologiques pour les Sociétés savantes de Normandie qui le comptaient parmi leurs membres ; on connaît aussi de lui des Éphémérides historiques de Rouen, publiées dans un journal de cette ville, et un Code de la chasse, dédié à M. Dupin, son ami, et qui a eu jusqu'à quatre éditions. 

Houël était membre de la Société de l'histoire de France presque dès son origine, et plusieurs années avant d'avoir quitté le tribunal de Louviers. Dès qu'il eut fixé son séjour à Paris, il devint un des membres les plus assidus aux séances du Conseil, et bientôt, à la mort de M. Dusommerard, en 1843, les fonctions de censeur lui furent confiées, d'abord avec M. Bouvier et quelque temps après avec M. le docteur de Bouis. 

Houël s'acquitta de ces fonctions délicates avec zèle, et même parfois avec une certaine rigidité qui, fort heureusement, n'avait à constater d'autres griefs que des retards dans les publications. Cette rigidité était, d'ailleurs, toujours tempérée par la bonté de ses intentions et de son caractère. 

Décédé à Paris en 1853, Charles-Juste Houël était gendre du baron Mercier qui fut pendant plusieurs années député du département de l'Orne.

Discours de M. J. Houël, lors de sa réception à la Société libre d'émulation de Rouen, Rouen Baudry, 1814.
Un Hippomane bas-normand
ou
Notes inutiles sur un sujet important, Rouen, 1819, in-8°.
Discours sur la condition de la république des lettres en général et des sociétés savantes en particulier, sous divers gouvernements, Rouen, F. Baudry, 1822, in-8°
Code de la chasse, Renault, 1823, in-32, plusieurs éditions.
Notice sur un bas-relief trouvé à Rouen, Mémoires de la Société des antiquaires de Normandie, 1825
Recherches sur la date de la naissance de P. Corneille, Rouen, Nicétas Périaux, 1828, in-8°
La Harelle de Heurteauville, Rouen, F. Baudry, 1829, in-12.
Discours prononcé par M. Juste Houël lors de son installation comme président du tribunal civil de Louviers, le 27 novembre 1830, Rouen, D. Brière, 1830

De la Pairie, pétition à la Chambre des Député, Rouen, impr. de D. Brière, 1831.
Jean Jouvenet et sa maison natale, Rouen, 1836
Notice manuscrite sur la vie et les ouvrages du peintre Jean Jouvenet, ouvrage envoyé au concours ouvert sur ce sujet par l’Académie de Rouen et qui mérita à son auteur une mention très honorable en 1836.
Le Nouveau code de la chasse, ou la Loi du 3 mai 1844 en harmonie avec les autres lois et décisions qu’elle laisse subsister sur la chasse et le port d’armes, Paris, Crapelet et Lahure, 1844
Annales des Cauchois depuis les temps celtiques jusqu’à 1830, Paris,1847, 3 vol. in-8°.

On a encore de Charles-Juste Houël un grand nombre de Mémoires judiciaires, dont la collection forme 5 vol. in-4°, 
Discours sur l’amitié des hommes de lettres, lu à l’Académie de Rouen.

Ajoutons un Catalogue de la Bibliotheque de feu M. Juste Houël, avocat de la cour d'appel de Paris, contenant la jurisprudence et quelques grands ouvrages, Paris, Teehener. 8 vl.
SOURCES
Bulletin de la Société de l'Histoire de France, 1853.
Harelle de Harteauville, J. Houël, Baudry.