1) Hector Le Guerchois (1560-1622)
Les Le Guerchois s"inscrivent de longue date dans l'histoire de la capitale normande. En 1562 est attesté un Jean Le Guerchois, "procureur et recepveur général" de la ville de Rouen. En 1575, on trouve mention de Guillaume Le Guerchois, licencié "es-loix, lieutenant général de M. le Vicomte de Rouen."
Les
Le Guerchois qui
nous intéressent vont occuper des postes de tout premier
plan au
sein du Parlement de Normandie.
C'est là qu'est concentré le pouvoir provincial et seule une instance est au dessus de sa tête : le conseil du roi.
Hector Le Guerchois était marié en secondes noces à Marie Piedeleu, dame de la Machue, fieffée à Autretot. Il était seigneur de la Garenne et fut reçu second avocat général au parlement de Rouen en 1612. Ce haut fonctionnaire de la province possédait alors quelque bien à Port-Jumièges, sur le bord de la Seine, et venait parfois s'y retirer. Le Bénédictin qui rédigea la chronique de l'abbaye nous en parle ainsi : |
Armes des Le Guerchois
D'azur, à un lion d'argent, lampassé et armé de gueules ![]() Ce sont là les armes de base des Leguerchois que l'on retrouve déclinées sous diverses variantes. |
Le "miracle" de Port-Jumièges
M. Le Guerchois, disent nos manuscrits, étant venu à Jumiéges, où il avoit une terre sur le bord de la Seine, y fit un séjour d'un mois.
Ses affaires terminées et déjà en chemin pour retourner à Rouen, son cheval qui n'avoit paru jamais vicieux, l'emporta dans la rivière et la traversa jusqu'à quatre fois sans pouvoir être arrêté. Dans ce péril, il sollicita l'intercession des saints qu'on honore à Jumièges, et promit à Dieu d'augmenter les revenus de l'abbaïe et d'y choisir sa sépulture, si sa bonté le délivrait de ce danger.
Il ne fut pas longtemps à ressentir les effets de sa prière. A peine l'avait-il finie que son cheval le ramena à terre, au grand étonnement des spectateurs qui, ne l'apercevant plus sur la surface des eaux, avoient désespéré de sa vie.
Reconnaissant,
Hector
Le Guerchois fit don d'une rente de 52 livres et 17 sols aux religieux
et, quand il vint
à mourir à Rouen,
le 4 mars 1622, il fut selon sa volonté inhumé
dans la chapelle de la Vierge à Jumièges.
Tout près d'Agnès Sorel. Jusque là, les Le Guerchois reposaient en l'église de St-Étienne-sous-Bailleul, dans l'actuel canton de Gaillon, Eure. Une église qui a disparu du paysage. Elle renfermait les tombeaux de trois générations de Le Guerchois. |
L'épitaphe d'Hector Le Guerchois : D. O. M.
Hin
jacet vir nobilis Hector Le Guerchois, dominus de la Garenne, in
supremâ Normanniæ curiâ clarissimus et
spectabilis advocatus regis
generalis, qui sanctissimo et religiosissimo gemeticensi monasterio
devotus, in eo sepulturam suam elegit. Decessit die veneris, quarto
martii anno Domini millesimo sexcentesimo vigesimo secundo,
ætatis suæ
sexagesimo secundo.
|
NB : Deshayes se trompe cependant en faisant mourir Le Guerchois le 4 mars 1662.
Fils, du précédent, il ratifia la rente voulue par son père devant Du Saussai, notaire à Jumièges, sans que la dite ratification lui garantisse clairement le droit de sépulture à Jumièges. Il en bénéficiera cependant à sa mort. Et après lui encore son fils et sa belle-fille. | Sur
cette carte de
Cassini, on
voit figurer une noble maison au nom de La Garenne.
Saint-Etienne-sous-Bailleul, fief des Le Guerchois, près
Vernon,
possède alors une église du nom de
Saint-Etienne-de-Cantelou placée sous le patronage de
l'abbé de Jumièges depuis de le XIIe s. Elle sera
désaffectée
à la Révolution.
|
Seigneur de la Garenne et d'Autretot, Pierre Le Guerchois avait été reçu second avocat-général au parlement de Rouen en 1623. Il succédait à son père dans cette charge.
Son premier mariage, contracté le 1er janvier 1628 à Rouen, paroisse Saint-Patrice, fut de courte durée. Marie Andry rendit l'âme peu après son hymen. Pierre Leguerchois se remaria très vite, le 2 juillet 1629, paroisse de Saint-Godard, avec Anne Marcel de Bouqueval.
Pierre Leguerchois figure parmi les contributeurs qui financèrent à Rouen les biens de l'abbaye de Jumièges au manoir de la Poterne.
Révoltes populaires
En novembre 1623, l'administration fiscale eut l'idée saugrenue de taxer foule de petits métiers, ce qui provoqua une révolte populaire. Un avocat, du nom de Cocherel, fut le porte-voix de cette sédition et Pierre Le Guerchois, sur les marches du parlement, relaya la fronde si bien qu'il fut bientôt interdit. Alors qu'une répression sanglante s'abattait sur les mutins, il fallut qu'une délégation parlementaire se rende au cabinet de Louis XIII pour que le roi accorda son pardon au bouillant avocat général prostré à ses genoux..
Quinze ans plus tard, une nouvelle révolte éclata. Celle des nu-pieds (1639-1640). Elle partit de l'Avranchin où l'on voulut imposer la gabelle aux travailleurs du sel qui en étaient exempts. Bientôt, toute la province s'embrasa avec un arrière-fond de nationalisme normand. La révolte gagna Rouen et Richelieu chargea le chancelier Séguier, l'homme fort du royaume, de la réprimer. Le Parlement apporta un concours plus ou moins franc tandis que la Normandie était sous occupation militaire. Cette sédition, Le Guerchois la combattit en tout cas. Le 19 décembre 1639, il amena le Parlement à promulguer un arrêt contre ceux qui répandaient des libelles et affichaient des placards poussant à l'émeute.
La révolte des nu-pieds, gravure éditée à Rouen.
Le 29 décembre 1639, une députation du Parlement alla trouver le chancelier Séguier à Gaillon pour lui demander d'exempter les notables de l'obligation de loger les gens de guerre. Guerchois n'était pas de la délégation. Quelques jours plus tard, il demanda audience à Séguier et le journal du chancelier nous explique pourquoi : "Peu après s'est approché, seul et en long manteau, le Sr Le Guerchois, l'un des advocatz de sa Majesté au dict Parlement de Rouën, lequel s'est excusé de n'avoir accompagné Mrs les présidentz et conseillers du Parlement en la première députation qu'ilz envoyèrent à Gaillon le vendredy précédent à cause de l'obligation qu'il avoit de demeurer au parquet destitué du procureur général par sa mort arrivée depuis peu." Le Guerchois assurait en effet l'intérim de Georges Sallet, sieur de Guilly, mort "de frayeur" le 15 septembre de cette année 1539. |
De l'éloquence de Pierre Le Guerchois... J'ai
aussi écouté dans le même Parlement, M.
le Guerchois Avocat Général,
homme d'une grande éloquence; mais d'une
éloquence trés solide , qui
étoit plus dans les choses que dans la beauté de
la déclamation qu'il
avoit trop négligée, ne soutenant pas assez sa
voix qui ne flâtoit pas
les oreilles. (...) Il étoit fils d'un Pere, auffi
Avocat Général dans
le même Parlement & qui avoit eu la
réputation d'être éloquent ;
mais non jusqu'au point de son fils. M. le Président de
Franquetot le
comparoit au vin de Champagne, qui est excellent au dessus de la barre;
encore assez. bon à la barre , mais qui au dessous
s'affoiblit & a
un mauvais déboire : C'est-à-dire, que cet
Orateur , quand d'abord il
jettoit son feu , charmoit; quand ce feu se ralentissoit, il plaisoit
encore un peu, mais ce feu étein , l'Orateur ne faisoit plus
que
languir & le Bareau s'endormoit.
Bonaventure
d'Argonne, Mélanges, 1701.
|
Au registre secret du Parlement de Rouen du 9 janvier 1642 se trouve un curieux mémoire de l'avocat-général Le Guerchois contre la prétention qu'avait le Procureur général d'exercer seul et exclusivement le ministère de la plume depuis 1640. Le 19 avril 1644, il fit condamner le curé d'Anneville, Jean Le Bourgeois, a ôter les armoiries et autres signes distintifs apposés dans le choeur de l'église lors de l'inhumation d'un sieur de Brecy. Ceci pour faire respecter la prééminence du seigneur Dupont en cette église. Pierre Le Guerchois intervint lors du procès de Tranquerel, prête-nom des Jésuites de Rouen qui avait fait imprimer sans autorisation des écrits jugés contraires aux maximes du royaume. On l'entendit fustiger les curés qui ne résidaient pas dans leur paroisse, les accuser de hanter les dames. Ce fut aussi un adversaire redoutable de la religion réformée. On l'entendit dire à l'encontre des demoiselles Mahiet qui tenaient une école protestante : "l'écriture, un art si noble, ne doit pas être enseigné par des femmes." |
Son épitaphe ADSTA, VIATOR, GEME ET ORA.
|
Pierre Le Guerchois est mort le 8 octobre 1652 en son domaine de La Garenne et alla reposer dans l'abbaye au côté de son père Hector. Son acte d'inhumation ne figure pas dans les registres paroissiaux. Sa veuve eut des libéralités pour l'abbaye comme en témoigne cet extrait des archives :
Les religieux associent à leurs prières dame Anne Mansel, veuve de feu noble Pierre Le Guerchois, vivant conseiller du Roi et premier avocat général au parlement de Rouen, et dont le corps repose en l’abbaye, et s’engagent à faire poser une épitaphe dans la chapelle Notre-Dame en reconnaissance de la somme de 1,200 livres qu’elle avait donnée (Document à consulter sous la cote 9H36).
3) Pierre II Le Guerchois (1631-1692)

Deuxième du nom, seigneur de la Garenne, Pierre Le Guerchois est né en 1631. Nommé second avocat général en 1653, il remplira cette charge durant 28 ans avant d'embrasser celle de procureur du Parlement de Rouen.
de Pierre Le Guerchois.
Il épousa, le 13 juin 1659, en la paroisse de Saint-Godard de Rouen, une jeune femme de 19 ans issue aussi de la noblesse de robe. Son nom n'est pas très joli. Mais la dame, si. Il s'agit de Barbe de Becdelèvre, baptisée à Saint-Godard le 7 mars 1640. Elle est la fille de Madeleine de Moy et de Pierre de Becdelièvre, seigneur d'Hocqueville, marquis de Quevilly, gentilhomme de la chambre du Roy en 1620, premier président de la cour des Aides de Normandie puis conseiller d'Etat en 1644. Conseiller en tous ses conseils en 1646.
Mon ancêtre, Jean Mainberte, eut affaire à Pierre Leguerchois. Le douzième jour de novembre 1662, par devant Pierre Delavigne, arpenteur du roi, Jean Mainberte vendit à Pierre Le Guerchois à fin d'héritage tant pour lui qui pour ses hoirs et ayant cause deux pièces de terre en nature de labour et marest dans la paroisse de Jumièges, triage du Clos-Cauvin. La première bornée d'un côté le chemin du Roy, d'autre côté Valentin Delametterye et des deux bouts Nicolas Cauvin. La seconde au même triage. En la maison de Pierre Le Guerchois, avocat au parlement de Normandie
Les témoins de cette transaction furent Nicolas Levavasseur et Pigache.
Un lundi 13e jour d'un mois et an qui n'est pas
précisé, sans doute novembre 1662, Charles
Mainberte est cité dans une transaction passée
à Jumièges entre Jean Tirel, de la famille de son
épouse et Monsieur Le Guerchois.
Jean Tirel reconnait avoir reçu 200 livres de Le Guerchois,
acquisiteur de Charles Mainberte. Il y est fait rappel d'un acte de
tutelle passé chez le sieur bailly de Maulévrier
le 15 mai 1636. Les témoins de cet acte furent honorables
hommes Pierre Cauvin et Pierre de Rouen, demeurant à
Duclair.
Sur ce plan dressé par l'arpenteur Fleury en 1674 figure la maison sur Sieur Le Guerchois. Elle semble se situer à l'emplacement de l'actuelle ferme des îles mais ce plan est imprécis. |
Procureur
général
Le 12 novembre 1669, à l'ouverture du Palais, Le Guerchois prononça une harangue sur le métier d'avocat, ce qui lui confirma ses talents d'éloquence. (Lire en pièce annexe)
1681 : Pierre Leguerchois est nommé procureur général du roy en la province Normandie. Il remplace ainsi Philippe Maignard, inapte à remplir cette fonction et qui se démet en sa faveur. En devenant procureur général, Le Guerchois allait désormais d'exprimer par écrit. Ce qui lui valut des regrets tant ses talents oratoires étaient célébrés. C'est ainsi que Me Louis Gréard composa ces vers à ce sujet : |
![]() La grand salle des procureurs au Parlement de Rouen |
Vous, dont la sublime éloquence,
A consacré le nom à l'immortalité,
Pourquoi, dans le désir d'un aurre dignité
Vous condamnez-vous au silence !
De l'emploi, qui vous a tenté
Je conçois la grandeur, l'éclat, l'autorité ;
Mais, enfin , vous avez beau faire,
Guerchois, pour vous y signaler,
En 1682, un certain H. Fiot dédia une comédie en trois actes, L'amour fantasque ou Juge de soi-même, à Pierre Le Guerchois.
Comme son père, Leguerchois fut un adversaire acharné des Protestants. Au temps où il était encore premier avocat général, Pellot, président du parlement, décrit son ami comme étant un "homme fort éclairé, éloquent, parle facilement et fortement, a l'esprit doux et honneste, considéré au Parlement. Il est assez particulier dans ses plaisirs et s'applique peu à l'étude." Et une main rajouta: "a, depuis, pris la charge de Procureur général où il ne réussit pas si bien, la faict sans vigueur, plein de mollesse et de faiblesse... Tout attaché au détail de son bien et peu à sa charge."
Pierre Leguerchois, voilà donc cet homme dont la rumeur voudrait qu'il ait été trompé par son épouse. Celle-ci se retrouve veuve à 52 ans. Nous sommes le mardi 11 février 1692. Elle a encore vingt belles années devant elle."Noble personne messire Pierre Le Guerchois, escuyer, seigneur de la Garenne et autres lieux, procureur général du Roy en la province de Normandie a été inhumé dans la chapelle de la Vierge de l'abbaye de Jumièges le jour et an susdits". L'acte d'inhumation de Pierre Leguerchois daté du 11 février. Etienne Le Picard, sous prieur de l'abbaye, officia. C'est le seul acte de la famille qui figure dans les registres de Jumièges.
Le 28 février 1692, Dom Mabillon adressa au prieur de l'abbaye de Jumièges, Dom Martin Filand, l'épitaphe de Pierre Le Guerchois (BNF ms lat. 11.8GG fol 257-257) :
STA, VIATOR, LEGE ET LUGE.
Hic jacet vir illustrissimus ac nobilissimus Petrus Le Guerchois eques, dominus de la Garenne, Autretot, Sainte Colombe, et avitæ et paternæ dignitatis a primâ adolescentiâ hæres. Hanc, annos viginti natus, sustinuit eâ eloquentiâ quam totus stupens senatus susciperet, susciperent peritiores, pauci æmularentur, mirarentur omnes. Post emensos in hâc palestrâ annos ferme triginta, a Ludovico magno magni sit instar elogii, unicim regiæ volontatis organum, publicæ securitatis vindex et parens, sequenter juris et legum custo, Procurator generalis renonciatus. Facundiâ, integritate, equitata partes illas ita implevit, ut vix ulli secundus. Cui virtus citra facum, gravitas sine fastu, innocentia animi cum eâ constantiâ, quam non opes aut potentia frangerent, non favor aut gratia emollirent. Qui denique ita semper Dei, regis ac provinciæ leges coluit, servavit, exegit quasi legibus ipsis, imo legum autori brevi rationem redditurus. Obiit anno M. D. C. XCII, die II februarii, liberis sex, masculis 2, 4 fœminis ex piis. et nobilis. uxore Barba De Becdelièvre r. d'Hocqueville relictis, quæ una, cum sobole, optimo conjugi hoc monumentum mœrens posuit. Tu viator, æternam ei felicitatem adprecare.
4) Pierre-Hector Le Guerchois (1670-1740)
Né
le 28 octobre 1670, Pierre-Hector
Leguerchois fut reçu conseiller au Parlement de Rouen le 19
mai
1691 à l'âge de 21 ans. Le
14 février 1692, le duc Claude de Saint-Simon écrivait au contrôleur général
le Peletier
(Arch, nat, G7 5432)
Monsieur, Agréez, s'il vous plait, que j'emploie tout le crédit que je puis avoir auprès de vous
en faveur de M. Leguerchois qui aura l'honneur de vous
rendre cette lettre. Il vient de perdre
Monsieur son père, procureur général au parlement de Rouen, et il espère que le Roi lui fera la grâce de lui
conserver cette charge, ou en lui donnant son agrément pour la remplir lui-même,
ou en permettant que M. Dubois-le-Vicomte, son beau-frère,
ancien conseiller au même
parlement, l'exerce pendant quelques années, pour la lui remettre quand S. M. le jugera à
propos. Il y a plus d'un siècle que
les charges d'avocat général et de procureur général sont
dans cette famille, et elles ont été exercées avec tant d'honneur et de probité, qu'il a sujet
d'espérer
que le Roi ne désapprouvera pas le desir qu'il il d'imiter les exemples de ses ancêtres. Il a commencé depuis quelque temps à travailler sous
Monsieur son père, et je lui connois de si
bonnes inclinations, que j'ose vous répondre qu'il servira très dignement le Roi et le public, si
S. M. a la
bonté de lui accorder ce qu'il demande.
Le 4 avril 1699, voilà Leguerchois maître des Requêtes de l'hôtel du Roy. Cette même année 1699, à Jumièges, sa veuve de mère parraine avec lui la grosse cloche de l'église Saint-Valentin qui vient d'être refondue. En témoigne cette inscription partiellement effacée :
1699, Mr Michel Viel, natif de Jumièges, curé du dit lieu. Nommée Barbe par très noble dame Barbe de Becdelièvre d’Hocqueville, veuve de Mr Pierre Le Guerchois, seigneur de La Garenne, Autretot, Sainte-Colombe et conseiller du Roi en ses conseils, son … lieutenant et …. au parlement de Normandie, par M. Pierre Hector Le Guerchoys, seigneur de La Garenne, Pelly, Canteleu-le-Bocage, Pope et Connelle, conseiller du roi et…. ordinaire de son hostel. Refondue par la libéralité des gens de bien, à la gloire de Dieu et de son Eglise. Gloria autem et honor. Pierre Legendre,.. Pierre Giot, Michel de…
Le 6 septembre 1700, Le Guerchois épousa la fille d'un conseiller d'Etat, Magdeleine d'Aguesseau.
En 1703, le roi fait de Pierre-Hector le haut justicier de Jumièges, Duclair et Yainville.
En 1705, lors d'un procès qu'il eut à soutenir à Rouen contre le duc de Brissac et la duchesse d'Aumont, le duc de Saint-Simon reçut le soutien de Pierre-Hector, l'ainé des Le Guerchois. Il restera ainsi son ami. Mieux : son protecteur auprès des instances royales.
Pierre-Hector est nommé Intendant d'Alençon en mars 1705. Là, il va contrôler l'administration du Perche.
L'abbaye rachète ses biens
Les archives de l'abbaye divergent quant à la date exacte de cette transaction. La chronique de l'abbaye de Jumièges nous dit que c'est en 1706 que la communauté fit l'acquisition de tous les biens de M. Le Guerchois dans les paroisses de Jumièges et d'Yainville avec la haute justice. 30.000 livres furent payées comptant. 4.000 livres pour le droit d'amortissement ne furent versées qu'en 1711.
Sous la cote 9 H 81, on trouvera les Titres relatifs aux propriétés vendues en 1708 aux religieux de Jumièges par M. Le Guerchois, avocat général au parlement de Rouen, ladite vente portant sur la haute justice de Duclair, Jumièges et Yainville, sur les fermes et terres de la Grande-Ferme, du Puis-au-Cras, du Quesnay et de la Navine ; et sur plusieurs pièces de terre en labour et en pré ; et les religieux, en vertu du contrat passé, accordant à M. Le Guerchois, pour lui et sa famille, une sépulture en la chapelle de Notre-Dame de Jumièges. (Voir aussi 9 h 57)
On donne aussi la date du 26 décembre 1709 et 13.000 livres pour la vente à l'abbaye de la grande ferme de Jumièges, deux petites pièces de terre au triage de la Tombe-aux-Sarazins, la ferme de la Navine et les droits de haute justice. Contre cela, les moines s'engagent à conserver au vendeur ainsi qu'à son frère, militaire au service du roi, à leurs descendants directs mais aussi à leur mère, "Madame la procureuse générale", une sépulture dans la chapelle Notre-Dame, là où reposent leurs ancêtres, là où repose Agnès Sorel.
Il est dit parfois que Leguerchois vendit son château aux moines à condition qu'il soit détruit. Les dépendances du château, visibles encore sur le quai, furent alors transformées en habitation pour le fermier des religieux. Une partie du bâtiment avait usage de chais où l'abbaye entreprosait ses crus de Longueville, près Vernon.
Entre temps, Pierre-Hector Le Guerchois poursuit sa carrière. En juin 1707, il signe un rapport sur le mauvais état des murailles de Bélème, à Alençon ruinées par le séjour de prisonniers de guerre. Saint-Simon se souvient du caractère autoritaire de son ami :
J'ai vu le Guerchois (...) lors intendant d'Alençon, me montrer, à la Ferté, un ordre de faire rechercher des gentilshommes de sa généralité qui avoient des enfants eu âge de servir, et qui n'étoient pas dans le service , de les presser de les y mettre, de les menacer même, et de doubler et de tripler à la capitation ceux qui n'obéiroient pas, et de leur faire toutes sortes de vexations dont ils seroient susceptibles...
(Saint-Simon, tome 1, pages 83 et 84).
Intendant de Bourgogne
Le 24 mai 1708, Pierre-Hector Le Guerchois devient Intendant de Bourgogne, province nouvellement rattachée à la France. Alors qu'il est déjà à Besançon, sa femme, restée à Alençon, accouche d'un fils envers lequel elle aura les plus grands soins d'éducation. Elle laissera dans ses papiers des écrits d'inspiration religieuse destinés à ce garçon et qui seront publiés après sa mort. Morceaux choisis :
J'avois eu le malheur, avant que vous vinssiez au monde, d'avoir trois enfants morts sans avoir reçu le baptême (Trois fois le verbe avoir dans la même phrase !) Ce Dieu tout bon & tout miséricordieux, après m'avoir affligée par la perte de ces trois enfants qui sont morts dans le péché du premier père, me donna une petite fille qui fut votre aînée & qui vécut assez de temps pour être lavée dans le sang de Jésus-Christ (...) vous vîntes au monde, mon cher fils, le sept du mois d'octobre 1708, un dimanche à une heure & demie après midi. L'ardeur avec laquelle je désirois vous rendre à celui qui venoit de vous donner à moi ne me permit pas de différer votre baptême & vous le reçûtes le même jour à quatre heures en l'église Notre-Dame d'Alençon notre paroisse...
L'acte de baptême de cet enfant prénommé Pierre Henry nous montre que Barbe Becdelièvre, veuve Pierre Le Guerchois, en est la marraine. Le parrain est l'aïeul maternel de l'enfant, Henry d'Aguesseau, conseiller d'Etat ordinaire, conseiller royal des finances qui a donné procuration à Jean-Baptiste d'Aguesseau, prêtre du diocèse de Paris, docteur en droit de la faculté de Paris. Absent, le père est déjà en Franche-Comté.
Bref, les Le Guerchois s'éloignent de la Normandie, ce qui explique sans doute les ventes faites en leur nom. Reste leur mère...
Pierre-Hector Leguerchois, un temps membre
du conseil supérieur de Bourgogne, 7e intendant
de Franche-Comté
La réincarnation d'Agnès
Barbe
Becdelièvre Le Guerchois
vécut encore trois ans après qu'elle ait
été la marraine de Pierre Henry. Elle est
décédée le mardi 2 juin 1711. Non
point au manoir
d'Agnès Sorel, comme l'affirme Charles Antoine Deshayes,
l'historien de
l'abbaye. Mais dans la paroisse de Saint-Patrice, à Rouen.
De
là, son corps fut transféré le
lendemain à
Jumièges. Son acte d'inhumation ne figure pas sur les
registres
paroissiaux et elle fut sans doute ensevelie par les religieux de
l'abbaye. Deshayes prétend que Barbe Becdelièvre
avait
légué quelques biens aux moines pour
être inhumée, comme ses ancêtres, dans
la chapelle
de la Vierge.
En 1712, en la paroisse de Saint-Patrice de Rouen, eut lieu une sonnerie sans
sépulture pour dame Barbe de Becdelièvre, veuve
de M. Le Guerchois. (ADSM
G7486.
Ce document mérite d'être consulté.
Sans doute une messe anniversaire.)
Toujours selon Deshayes, Mme Le Guerchois, dont la beauté était proverbiale, créa la confusion entre sa personne et la Belle des Belles. Les moines conservèrent ses meubles dans leur manoir du Mesnil où elle aurait habité. Contre quelques sous, les occupants des lieux vous les faisaient voir comme étant ceux d'Agnès. De mêmes que les armes de la famille Le Guerchois peintes sur les murs. On vous montrait le vieux châtaigner qui ombrage la cour comme ayant été planté au temps d'Agnès. Voire même de ses mains. Et là, regardez ce fauteuil de pierre formé par l'embrasure de la fenêtre. C’est là, oui c’est bien là qu’elle aimait à se reposer. Deshayes va jusqu'à affirmer que si la mémoire collective prétend qu'Agnès s'ébattait en plein air en compagnie de son confesseur, la confusion vient peut-être des moeurs dissolues de Mme Le Guerchois. Seulement Deshayes dresse ce constat d'adultère un siècle après la mort de l'intéressée. Quel crédit y accorder... |
Le manoir de la Vigne Chanoine
Jouen, Jumièges
En
1704, le locataire du manoir de la Vigne
était André Marescot, époux de Jeanne
Tuvache. |
L'alchimiste de la dernière chance
En Franche-Comté, Pierre-Hector
Le Guerchois, rejoint pas sa femme et jeune son fils,
vivait entouré d'une quarantaine de tableaux.
Essentiellement
d'inspiration religieuse. Hormis les portraits de Louis XIV et
Louis
XV, du maréchal de Villard, du cardinal Fleury. Une dizaine
de
chevaux s'alignaient aussi dans son écurie pour lui tirer
carrosse.
Sa mission n'était pas de tout repos.
Dès son
arrivée, il avait dû déjouer un complot
séparatiste au profit du roi de Prusse.
Sa gestion financière était par ailleurs
contestée. Mais surtout un grand malheur s'abattit sur la
famille quand le petit Pierre-Henry, assailli par la maladie, se trouva
en danger de mort. Nous sommes en septembre 1710. Aucun
médecin
de la ville ne sachant identifier le mal, le couple Le Guerchois
joua le tout pour le tout et s'en alla trouver un praticien
emprisonné depuis trente ans à la citadelle de
Besançon, le Dr Tournet. Celui-ci se prétendait
incarcéré pour avoir refusé de
révéler
à Louvois le secret de la transmutation des
métaux. Il
avait été embastillé en fait avec ses
deux
frères, l'un curé, l'autre militaire, pour
sorcellerie,
empoisonnement et faux-monnayage. Si le soldat avait
été
élargi, le curé, lui, avait
été rôti
en place de Grève
Oui, cela faisait plus de trente ans que Tournet croupissait à Besançon. Il fut d'abord enchaîné au mur de son cachot puis, faisant montre d'une grande pénitence, il lui fut accordé une cellule plus confortable tandis que des grands de Franche-Comté le consultaient avec l'autorisation du roi.
Les Le Guerchois lui présentèrent l'enfant qui bientôt ne fut plus en mesure de se déplacer. On eut mille peine à convaincre Tournet de venir chez l'Intendant. Le vieillard prétextait d'une difficulté à marcher. Il finit par s'y rendre dans le carrosse des Le Guerchois, accompagné du major de la place et sous bonne escorte. L'Intendant fit même dormir Tournet chez lui ce qui embarrassa l'administration pénitentiaire.
Le sort de l'alchimiste fut adouci par Le Guerchois qui lui donna liberté de mouvement dans la citadelle et le droit d'assister à la messe. Mais notre sorcier ne fit pas de prodige. Le petit malade fut inhumé le 24 octobre 1710. Le seul miracle du Dr Tournet fut de convertir aux yeux de Le Guerchois du cuivre en argent. Le roi en fut averti en juin 1711. On ignore le dénouement de cette étrange histoire.
Annales Franc-comtoises, 1904, PP 151-156.
Conseiller
d'Etat
Le Guerchois est nommé Conseiller d'État en 1717 et monte à Paris en septembre. Là encore, Saint-Simon est intervenu pour lui obtenir le poste. Le Guerchois se fit remarquer pour sa dévotion. Alors qu'il sortait du conseil d'Etat, un magistrat du nom d'Hérault lui en fit reproche un jour de 1732. Le Guerchois assura croire aux miracles et cita le cas de deux femmes, hier impotentes et désormais en parfaite santé. Faux, rétorqua Hérault qui assurait avoir vu ces deux personnes se languir. Le Guerchois vérifia la chose auprès d'elles et confondit Hérault dans ses mensonges. (Histoire des miracles et du culte de M. Paris, 1732, PP 126-127). C'est à sa charge qu'il décède subitement, le dimanche 27 mars 1740, à l'âge de 69 ans. Un après-midi que Durand de Missy, un sien parent, vient le visiter, celui-ci le découvre sans vie dans le fauteuil de son cabinet de travail. Le Guerchois fut enterré le mardi matin dans le cimetière de l'église Saint-André-des-Arts, à Paris. Contrairement au pacte passé avec les moines lors de la vente de ses biens, ce ne fut donc pas à Jumièges. Sa "vertueuse épouse" ne lui survécut que neuf mois et disparut en décembre 1740 Dès 1743, avec l'imprimatur du roi, ses écrits furent publiés sous les titres de Avis d'une mère à son fils sur la sanctification des fêtes ou encore Pratiques pour se disposer à la mort. Ces textes connurent un certain succès en leur temps. On loua l'esprit de charité chrétienne de celle qui fit pendre son cuisinier. |
Son cuisinier est pendu
Cette histoire ne grandit pas Pierre-Hector : Avril 1726. Le cuisinier de M. Le Guerchoys, conseiller d'État, avait écrit à son maître une lettre anonyme dans laquelle il lui disait de mettre un sac de louis sur la fenêtre de la rue, ou qu'autrement on l'assassinerait. On posta du monde dans la rue pour espionner, et on mit ensuite un sac de gros sous à la place indiquée. Le cuisinier, dont on ne se cachait pas, et qui entendait parler de ces détours, écrivit trois nouvelles lettres à M. Le Guerchoys, disant qu'on l'avait manqué tel jour sur le Pont-Neuf, lorsqu'il revenait de souper, parce qu'il était bien accompagné; mais que, tôt ou tard, il n'échapperait pas. Il eût été difficile de découvrir l'auteur de la lettre si, par hasard, on ne s'était avisé de donner congé au cuisinier. Madame Le Guerchoys, en le payant, lui ayant demandé une quittance qu'il lui donna, fut frappée de la ressemblance de l'écriture. Le cuisinier fut arrêté et, par sentence du Châtelet, confirmée par arrêt, il a été pendu, le 12 de ce mois, sur le quai des Àugustins, au bout de la rue Pavée, où demeure M. Le Guerchoys. Le peuple et bien d'autres gens ont trouvé ce jugement rigoureux, de faire perdre la vie à un homme qui n'a ni tué ni volé, et qui n'avait jamais fait une mauvaise action. La populace même en a marqué son ressentiment en cassant les vitres de M. Le Guerchoys ; mais, tout considéré, comme le cas est nouveau, on a bien fait de pendre cet homme pour l'exemple: surtout parce que c'est un domestique, et qu'on ne peut trop acheter la tranquillité publique. Journal
historique et anecdotique du règne de Louis XV.
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Lors des travaux du métropolitain, la plaque mortuaire de Le Guerchois sera transférée au musée Carnavalet.
Cy est le corps de Messire Pier(r)e-Hector Le Guerchois chevalier, seigneur de Sainte-Colombe Drozé, Percy, Gonelle, La Garenne Saint-Germain et SaintMartin de Vereuille, Foncarville, Averton, Gourcite et autres lieux Conseiller d'Etal ordinaire en son hostel, décédé le 27 mars 1740, âgé de 70 ans ou environ |
Mais n'oublions pas que Pierre-Victor Le Guerchois eut un frère, tantôt appelé Pierre, tantôt Charles qui, fut, nous dit Arsène Legrelle, l'un des plus brillants entre tous les officiers généraux offerts a cette époque par la magistrature rouennaise à la France. Je veux parler de le Guerchois, fils d'un avocat général que son éloquence un peu vive avait fait interdire sous Richelieu. Après avoir été capitaine au régiment des gardes, le Guerchois devint colonel de la Marine en avril 1702, et brigadier, en février 1704. A la bataille de Turin, il se comporta comme un véritable héros. En février 1707, nous le voyons présider à l'occupation de Barcelonnette et de sa vallée,ce qui ne l'empêche pas de remplir simultanément une importante mission diplomatique auprès des cantons suisses.
Avant la fin de l'année, il contribua à déloger nos ennemis de la Croix-Faron, près de Toulon. Promu lieutenant-général à la fin de sa carrière, le Régent, en 1719, le nomma gouverneur de la ville et du château d'Urgel, puis, peu après, le désigna pour commander l'armée en Cerdagne. Le Guerchois est presque un homme illustre du règne deLouis XIV. Voltaire lui a consacré quelques lignes, et, privilège bien étrange, il a trouvé grâce devant Saint-Simon, quoique d'origine parlementaire.(Bulletin de la société d'histoire de Normandie, 1894),
Blessé à la bataille de Parme, il est y mort en 1734 dans la 69e année de son âge. Lui non plus ne fut donc pas inhumé dans le caveau gémétique malgré le marché passé trente ans plus tôt.
Les Le Guerchois seraient restés sans descendance masculine, nous disent les généalogies. Nous verrons qu'il n'en fut rien. Ainsi s'acheva en tout cas la présence de cette famille dans la presqu'île de Jumièges où cependant perdura son souvenir. A la Révolution, l'église Saint-Valentin bénéficiait toujours d'une donnation faite par Mr Le Guerchois de 12# de rente foncière par an scituées sur des héritages au hameau de St Paul, Psse de Duclair a la charge de faire dire tous les ans un obit a trois hautes messes. La ditte rente revalidée par acte passé devant Mr Depouville notaire le 13 février 1773.
Après deux siècles de présence, l'ombre des Le Guerchois s'estompa sur la boucle gémétique.
Le 30 décembre 1854, décédait à l'hospice d'Evreux, une vieille demoiselle bien humble, bien pauvre, et qui, pendant près d'un demi-siècle avait tenu une école pour les petits enfants. Elle était née a Evreux, paroisse de Saint-Denis, le 16 avril 1772. Sa position ne répondait guère à son origine. Mlle Le Guerchois appartenait, en effet, à une famille dont plusieurs membres avaient occupé les fonctions les plus élevées (...) Tous ces grands magistrats étaient les ancêtres de la pauvre institutrice, qui avait été obligée de demander un dernier asile à la charité publique.
La consultation des registres est très vite édifiante. Dans les années 1736, autrement dit peu de temps avant la mort de Pierre-Hector Le Guerchois, vivait à Pont-Saint-Pierre, petite paroisse de l'Eure, un certain Barthélémy Le Guerchois. Il était l'époux de Geneviève de la Mare. Près de Louviers, Pont-Saint-Pierre était le domaine du marquis de Roncherolles qui affichait sa puissance aux créneaux d'un imposant château.
Ce couple Le Guerchois eut plusieurs enfants et, lors de la naissance de l'un d'eux, en 1744, on apprend la profession du père : marchand de vin ! Voilà qui anéantit les affirmations des archivistes d'Evreux. Vingt années passent. Le 23 décembre 1765, toujours à Pont-Saint-Pierre, on enterra Jacques Barthélémy Le Guerchois, aubergiste de 72 ans. Comment imaginer une parenté avec un conseiller d'Etat et un lieutenant général des armées du roi.
De notre marchand de vin est notamment issu Barthélémy Le Guerchois, né le 24 mai 1737. Son parrain fut Jacques Golle. La marraine Marie Quillebeuf, femme Boutelier.
En 1767 et 1768, Barthélémy Le Guerchois, second du nom, est attesté à Pont-Saint-Pierre où, marié à Marie-Anne Buisson, il exerce, comme son père, le métier d'aubergiste à l'enseigne de l'image de Saint-Pierre. Sa mère, Geneviève de la Mare, ne sait pas même signer son nom.
Mais, en 1772, nous le retrouvons à Evreux où il est devenu... juge audiencier aux sièges royaux. Reconversion spectaculaire. C'est cette année-là que naît la fameuse institutrice dont nous ont parlé les archivistes. Le parrain fut Jean-Laurent Picard, fils de Laurent, maître maréchal de la paroisse de Saint-Thomas et la marraine Marie Charlotte Leconte, fille de Jean Leconte, maître d'hôtellerie où pend pour enseigne L'épervier, de la paroisse de Notre-Dame de la Ronde.
En 1773, le 31 novembre, une nouvelle fille vint chez les Le Guerchois, Emmanuelle Thérèse. Barthélémy Le Guerchois était alors sergent royal. Le parrain fut Adrien Delauney, marchand de Sainte-Foy et la marraine Thérèse Elisabeth Barroi, fille de Jacques Barroi, éperonnier. Cette seconde fille épousa Jean-Pierre Patot de Grancourt en 1804. Barthélémy Le Guerchois était alors huissier. Elle décédera en 1814 en son domicile de la rue Joséphine à Evreux. Son époux était conducteur de travaux aux Ponts & Chaussées.
L'épouse de Barthélémy Le Guerchois, Marie Anne Buisson, est décédée le 20 octobre 1804 au domicile conjugal, rue de la Liberté. Son époux remplissait toujours sa charge. Outre l'invitable concierge de la mairie, sa mort eut pour témoin Louis Cauchoix, huissier de 43 ans.
Barthémy Le Guerchois mourut quant à lui le 3 octobre 1806 à 70 ans en son domicile situé rue Chartraine. Il avait cessé ses fonctions d'huissier. Et n'avait rien à voir avec ses homonymes du parlement de Normandie.
Harangue prononcée le 12 novembre 1669 par Pierre Le Guerchois à l'ouverture de la session parlementaire.
« Ce discours, prévient Le Guerchois, s'adresse principalement aux jeunes avocats qui prennent racine au barreau. C'est à eux à se taire, se souvenant que In sacrifiis imprimis silentium. Ils sont semblables à ces arbres nouvellement plantés que les naturalistes appellent arbores silentes. Ils prennent racine en terre et se contentent de pousser leur sève, sans porter de fruits. Les jeunes avocats qui entrent au palais, ces arbres nouvellement plantés qui ne donnent point encore de fruit, doivent avoir une grande retenue et garder le silence, qui est tout ce qu'on demande d'eux, et c'est aussi tout ce que Pytagore recommandoit aux jeunes gens de son temps,
« C'est aux anciens avocats à parler comme ils le font tous les jours par leurs sages plaidoiries. Mais, ils le doivent faire sans s'interrompre, car cela viole le respect qu'ils sont obligés de rendre au lieu ou ils sont.
Leur fonction est bien différente de celle des guerriers qui se mettent en ordre pour livrer la bataille. Quand ils ont donné l'attaque. ils se meslent tous ensemble et combattent sans aucun ordre ils attaquent mesme tous à la fois. Mais les combats qui se livrent sous l'estendart des Muses ne sont pas de mesme. L'attaque se fait séparémènt comme la défense.
Alternis dicetis, amant alterna camenae
« Les avocats doivent encore prendre garde de n'apporter point aux audiences toutes sortes de causes. Il y en a qui ne méritent point le temps de l'audience. Autrefois dans les sacrifices, on ne souffroit point de brûler sur les autels des plumes de pigeons et de tourterelles, que l'on jetoit à costé de l'autel comme une chose trop légère et qui ne le méritoit pas. On ne doit donc pas apporter dans le temple de la justice les causes légères et peu importantes. On les doit décider hors jugement et par l'avis d'un tiers, afin de laisser tout le temps aux grandes affaires. Il est donc bien nécessaire d'interdire toutes les paroles superflues. Il faut donner exemple aux juges subalternes afin qu'ils voyent de quelle manière il se faut comporter, et garder le silence si à propos qu'on n'ayt point lieu de dire que leurs juridictions soient mieux réglées et que l'on y plaide d'une manière plus honneste. Le plus souvent les huissiers, par leur négligence, sont cause de tant de bruit que l'on entend aux audiences : au lieu d'y estre pour faire silence, ils prennent le temps pour faire leurs affaires. Il en reste seulement un dans la chaire pour faire figure, qui faict souvent plus de bruict que les autres, ou bien qu'on est obligê d'avertir de faire son devoir.
« On remarque aussi une autre cause, qui provient de la précipitation des jugements que font les avocats dans le barreau, avant qu'une cause soit achevée d'être plaidée, ils en décident comme s'ils estoient les juges, des qu'on a proposé le faict, souvent mesme dès qu'on a posé la question, et cela cause un murmure fort importun qui empesche les juges d'entendre et qui rompt le respect deu à la justice.
« Mais le plus grand bruit vient de la licence que les procureurs prennent. Leur fonction est de se taire. Cependant ils veulent toujours parler. Les avocats n'ont pas plus tost finy qu'ils crient l'un contre l'autre. Il semble que le lièvre est levé, et qu'il n'y a qu'à courir après. Ils crient comme des grenouilles dans un marais.