En 1892, un épouvantable accident jeta la consternation à Quevillon. Une vieille femme mourut brûlée vive. La reconnaissance du corps fut insoutenable...


Native de Boscherville, Rose Elisabeth Lenfant, veuve Léger, était âgée de quatre-vingt-quatre ans. Rentière à Quevillon, elle était très connue et très estimée. Ce soir de janvier, elle se chauffait devant sa cheminée où flambait un énorme brasier de fagots. Lorsque tout à coup, prise sans doute d'un malaise, la malheureuse tomba dans le foyer. En un instant, les vêtements furent en flammes...

Ce ne fut que quelques heures après que Jules Deneuve, l'instituteur qui rentrait chez lui, fut attiré par une odeur très forte de chair et de chiffons brûlés qui semblait sortir de chez sa voisine. Pressentant un malheur, le quadagrénaire courut jusqu'à une vitre d'où il vit la pauvre femme étendue derrière sa porte d'entrée, face contre terre. Déjà le feu gagnait le rideau du lit et menaçait toute la maison.

Deneuve appela immadiatement au secours puis courut prévenir le maire qui fut bientôt sur les lieux. Là, des voisins venus de tous côtés, tentaient de pénétrer dans la maison mais la fumée était si épaisse, l'odeur si repoussante qu'il fallut attendre trois heures avant d'entrer enfin et éteindre le sinistre.

Que l'on juge du désespoir du maire lorsqu'il reconnut dans les débris informes et encore fumants qu'on lui présenta les restes de sa malheureuse sœur qu'il adorait. Il en était de même pour le petit-fils de la victime, M. Chefeville. Ce n'était plus qu'un amas d'os calcinés. Seule la tête était restée intacte et on lisait sur le visage de la vieille les horribles souffrances qu'elle avait endurée avant de mourir.

Le maire était abattu et ce ne fut qu'avec peine qu'on parvint à l'arracher à ce triste spectacle. Il eut cependant le courage de rédiger l'acte de décès de sa sœur. Il était une heure du matin. Les témoins furent l'instituteur et Alphonse Quibel, un journalier lui aussi voisin de la défunte. Au matin, on alla prévenir les gendarmes de Duclair et l'enquête conclut à l'accident. L'inhumation eut lieu ce jeudi après-midi au milieu d'une foule accablée par les circonstances du décès. On s'étonnait beaucoup qu'à son âge avancé, on l'ait laissée seule sans une servante pour veiller pour elle. Mais les conseilleurs sont rarement les payeurs. Surtout après coup. Reste que par une triste coïncidence, un autre vieillard, exactement à la même heure, était mort dans des circonstances analogues à Londinières.



SOURCES

L'Univers, 17 janvier 1892
Journal de Rouen.