Tuée par son taureau. Interdit d'église... Les faits-divers de 1836 à Sainte-Marguerite.

Marie-Françoise était née à Sainte-Marguerite le 25 octobre 1790 d'André Viard et Marie-Françoise-Elisabeth Le Boucher. A 23 ans, elle épousa Louis Amédée Saillard et le couple s'établit au hameau de Glatigny, à l'ombre du manoir des Titaire. Elle avait 40 ans quand, dans la chaleur de l'été 1836, survint ce fait-divers relaté par le Journal de Rouen.

« On nous écrit de Duclair, 15 juillet. Un événement bien affligeant est arrivé aujourd'hui même dans la commune de Sainte-Marguerite-sur-Duclair. Une femme Saillard, âgée d'environ 40 ans, sortant de son domicile pour faire rentrer ses bestiaux, au nombre desquels se trouvait un taureau, a été assaillie par ce dernier qui l'a tué sur la place sans que son mari, présent à cette horrible scène, ait pu lui porter de secours dans la crainte de s'exposer lui-même à une mort certaine.

Cette malheureuse se plaisait à caresser cet animal qui, jusqu'alors, s'était montré très doux.

Ce terrible exemple rappellera aux cultivateurs qu'ils ne doivent négliger aucune précaution pour empêcher l'effet des accès de fureur auxquels ces animaux sont malheureusement trop sujets et qui ont occasionné de si déplorables malheurs. »

Journalier, ami et voisin de la défunte, Jean-Augustin Maugis alla déclarer le décès en mairie en compagnie d'Antoine Anatholie Ponty, lui aussi journalier et se disant ami de Marie-Françoise. Deux hommes qui ne savaient signer. Frémont, le maire, rédigea l'acte de décès.

La voie du seigneur impénétrable

Quelques mois plus tard, le même Journal de Rouen prit du plaisir à relater cet incident :

"Le sieur Lazare Groult est un des fidèles de la paroisse de Sainte-Marguerite-sur-Duclair et, le 11 décembre 1836, suivant l'usage antique et solennel, il venait dans son temple adorer l'Eternel. Seulement, il arrivait un peu tard., à onze heures. Or, à Sainte-Marguerite, la messe commence à dix heures, heure militaire. Aussi, M. le curé faisait déjà le prône et la porte de l'église était fermée.

Notre paroissien a si souvent ouï dire qu'hors l'église, il n'y a point de salut, qu'il ne voulut point rester hors. Mais le moyen d'entrer ? Le sieur Groult connaît son missel. Il sait ce précepte de Jésus Christ : frappez à la porte, et on vous ouvrira. Il frappe donc, mais on ne lui ouvre pas et M. l'abbé, troublé dans son sermon, lui dépêche charitablement le maire et le garde-champêtre. Insistance du paroissien pour entrer, refus des municipaux, procès-verbal et enfin citation devant le tribunal correctionnel.

Que, lorsqu'il y a de bonnes vérités à entendre au palais de justice, on laisse entrer le moins de monde possible et qu'on ferme ensuite les portes de l'auditoire, cela s'est vu. Et il n'y a pas longtemps encore. Mais à l'église, on avait pas encore eu recours à un tel expédient. De quel droit, en effet, interdire à un Catholique, apostolique et Romain, l'entrée de l'église quand, pour ceux qui n'y viennent pas, il y a damnation éternelle ? Et que signifient des sermons à huis-clos ?

Aussi Me Calenge soutenait-il que le desservant de Sainte-Marguerite n'avait pas le pouvoir de fermer ainsi les portes du temple. Mais le tribunal, sans s'arrêter à ce point de droit canon, a déclaré constant le trouble apporté à l'exercice du culte, et, néanmoins, ayant égard aux circontances atténuantes, il n'a condamné le sieur Groult qu'à 16 francs d'amende.

Avis aux fidèles en général et aux paroissiens de Sainte-Marguerite en particulier !"