LES DIFFICULTÉS DE LA
NAVIGATION
DANS LE PASSÉ
:
- les
marées : la Seine : un
fleuve ou la mer ?
La Seine subit l'influence
de la marée qui change de sens 4 fois par jour ; il faut
environ
6 heures à la marée pour atteindre le port de
Rouen (Port
Maritime)
- la
largeur de la Seine : le fleuve
s'étalait
dans un lit large de 2 à 3 km selon les endroits.
- les
bancs de sables : nombreux et changeants,
ils constituaient un danger permanent pour la navigation. Certaines
sections
de la Seine n'offrent pas assez de profondeur d'eau.
- les
îles : il y avait 18 îles
sur le fleuve entre Rouen et la mer.
- Le
mascaret : phénomène spectaculaire
mais très dangereux pour la navigation à chaque
équinoxe.
- Les
embûches du climat : la brume rendait
la navigation difficile à une époque
où le radar n'existait
pas.
Les
crues détruisaient les rives et interdisaient
la navigation car le chenal n'était plus visible.
Au
19 ème siècle, l'accès au
port de Rouen est de plus en plus difficile... la taille des navires
augmente...
le fleuve s'ensable... le chemin de fer arrivent à Rouen en
1843...
on veut le prolonger jusqu'au Havre!!! Le port de Rouen est
menacé...
LA
NÉCESSITE DE L'AMÉNAGEMENT
DU FLEUVE :
1- Campagne de persuasion :
"Il
faut endiguer la Seine pour sauver le
port de Rouen"
L'endiguement : c'est le
rétrécissement de la
largeur du fleuve – par la construction de digues –
pour permettre son
approfondissement.
Cette solution technique existe déjà ; plusieurs
ports anglais
situés en fond d'estuaire ont
expérimenté des travaux.
Mais l'enjeu financier est tel que le port de Rouen ne dispose pas
des moyens pour l'engager. Il faut l'effort de la France....
Jean Rondeaux, Président de la Chambre
de Commerce de Rouen se
met à la tâche. Le programme des travaux
s'élève
à 21 millions de francs dont 10 millions sont
nécessaires
pour engager la première phase des travaux.
En 1845, les
ingénieurs et parlementaires se rendent en
Basse-Seine puis en Grande-Bretagne pour visiter les chantiers sur les
rivières suivantes : la Clyde, la Tyne, la Humber, la
Tamise. C'est
ainsi que les capacités d'accès sont rendues
respectivement
aux ports de Glasgow, Newcastle, Hull et Londres.
En 1846, le 6 mars, la
Chambre des députés
vote le crédit demandé pour une
expérimentation sur
une section limitée, entre Villequier et Quillebeuf. C'est
alors
qu'intervient Lamartine.
Son discours est resté
célèbre :
" Il est impossible que la France
s'arrête
à une telle
difficulté. On vous dit : vous luttez avec la nature ! La
nature
sera plus forte que vous, Messieurs une pensée contraire et
plus
vraie a soulevé mon âme en entendant cette
assertion. Lutter
avec la nature mais c'est l'homme tout entier. C'est la vie humaine.
C'est
la vie des nations ! Ce grain de foi avec lequel dans les Livres
Saints,
on nous dit que nous soulevons les montagnes, qu'est-il autre chose,
que
l'intelligence assistant la science, appliquant la volonté,
la persévérance
humaine à dompter la création.
Vous avez à faire une expérience
de deux ou trois
millions. Qui pourrait vous affirmer que cette expérience ne
sera
pas heureuse ? Personne. Mais, vous pouvez affirmer qu'elle sera
profondément
utile. Faites-la donc, et quand elle ne réussirait pas, les
illusions – si vous voulez –
d'amélioration et de
prospérité de
cette grande cité de Rouen, de cinq millions de populations
riveraines
et de tous vos ports de mer en rapport avec Rouen, ne serait-ce pas un
motif suffisant pour la tenter. Mais je dis plus. Quand cette
expérience
n'aurait pour résultat même en
échouant, que d'arracher
enfin son secret au fleuve, son secret à la
marée, son mystère
à la navigation maritime de la Seine, oui, quand elle
n'aurait pour
résultat que d'arracher le oui ou le non
définitif à
la nature, sur la possibilité ou l'impossibilité
de prolonger
de cent vingt kilomètres la navigation française,
ce oui
ou ce non arrachés à la nature valent
à eux seuls
vos deux millions !"
Peu de temps
après, la Chambre des pairs où
siège
Victor Hugo, qui connaît bien les lieux et qui est acquis au
projet,
confirme son accord.
Construction des
digues entre Caudebec-en-Caux et Villequier
photo
Alain HUON (copyright)
2- Les premiers aménagements du fleuve
:
Le
Chantier commence en 1848.
Les
travaux portent sur la construction de deux
digues latérales, secteur de Villequier/ Quillebeuf.
Les
résultats se font sentir aussitôt
:
"Tous les courants
divers, réunis en
un courant unique, ont commencé de creuser au fleuve un lit
profond
et sûr. Ce jusant, ce flot qui roulait nos navires s'aplanit
devant
eux. Ces sables mobiles, qui étaient leur linceul,
rejetés
maintenant par delà ces digues, vont se fixer à
la rive et
s'étendre en plaines fertiles et riantes."
En août
1850 : l'ensemble du programme
est accompli.
Sur la rive droite, on a
construit une digue de 18
km.
Sur la rive gauche deux
tronçons : l'un
de
8400 m et l'autre de 1400 m.
Les profondeurs de la
Seine, au moment des pleines
mers sont ainsi portées de 3.5 mètres
à
6.5 mètres
et des centaines d'hectares de sable sont transformés en
prairies.
Le port de Rouen est sauvé.
Les travaux
d'endiguement du fleuve jusqu'au
port de Rouen vont se poursuivre encore pendant 20 ans....
Les travaux d'estuaire, quant à eux vont
se poursuivre jusqu'en 1962...

image
surréaliste??
Non....
image quotidienne de navires rasant les maisons du bord de l'eau...
LES
GRIBANES DE SEINE
- Utilisée
dès le Moyen-Age, la gribane était le bateau
utilisé pour le bornage
c'est-à-dire pour la navigation
en Seine, de petit port en petit port. Elle était
adaptée
aux conditions locales de navigation. 20 mètres de long sur
6 mètres
de large, la gribane avait un faible tirant d'eau : seulement 90 cm,
lui
permettant ainsi d'accoster très près des berges.
- Le chargement des
marchandises se faisait en ponté
(c'est-à-dire
sur le pont plat) et non dans la cale. De ce fait, son utilisation
devint
systématique pour l'endiguement de la Seine : le transport
des pierres
se faisait donc sur le pont. Les opérations de chargement et
déchargement
étaient ainsi moins coûteuse.
- Les gribanes connurent
leurs heures de gloire au milieu du XIXème
siècle. Elles étaient au nombre de 150 sur la
Seine.
Voici la
dernière gribane de Seine baptisée "JOBLE", nom
d'un petit village près d'Honfleur.
Construite en 1886 près de Rouen, son
propriétaire l'utilisa pour l'endiguement du fleuve.
Venez la
découvrir au :
MUSÉE
DE LA MARINE DE SEINE
Avenue
Winston-Churchill
76490
CAUDEBEC-EN-CAUX
(Normandie)
tél.
: 02 35 95 90 13
photo :
Alain HUON (copyright)
Dossier créé par
Sequana-Normandie
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Modifié le 22 septembre 1999
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