Dans le Calvados, Ouézy était l'une des plus anciennes possessions de l'abbaye de Jumièges. En 1789, ses habitants se révoltent contre l'ancien régime. A Jumièges, les moines tiennent une cellule de crise...

Dans quel état d'esprit se trouvaient nos moines, quelques jours après la prise de la Bastille. Ils se disent prêts à renoncer à certains de leurs privilèges pour soulager la misère du peuple. En revanche, ils s'insurgent contre le pillage de leurs biens. Ecoutons-les...

L'an de N.C. 1789, le 31 juillet, le R. prieur a fait assembler la communauté au son de la cloche en la manière accoutumée et lui a fait lecture d'une lettre de M. de Picquet en date du 26 du présent concernant une révolte à Ouézy.
Cette lettre signée aussi de Jean Moriëre notre fermier transcrite ad calcem, feuillet 190, vu et délibéré la dite lettre, arrêté par le dit sieur prieur répondroit à M. de Piquet que nous étions dans ce moment sous la garde de l'assemblée nationale dont l'intention ne pouvoit être qu'on employât la violence pour anéantir les propriétés, que nos représentants avoient déjà abandonné une partie de nos privilèges en faveur des vassaux, qu'il falloit attendre la fin de l'assemblée nationale, aux dispositions de laquelle nous nous ferons un devoir de souscrire relativement aux
OUEZY

Guillaume II Clarel faisait partie de la cour de l'abbé de Jumièges. Il est cité dans des chartes de 1127 et 1141 comme témoin de la donation faite aux moines de Jumièges par Hubert de Méry de terres sises en la paroisse d'Ouézy, près Mézidon, diocèse de Sées, aujourd'hui département du Calvados.
Le prieuré bénéficia encore de dons émanant de voisins comme Roger de Cesny ou encore Rose d’Ouézy qui légua en outre des vignobles en Angleterre. Le vin est d’ailleurs une production importante à Ouézy pendant tout le Moyen-Age
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 moyens de soulager le peuple, même à nos dépens, ce qui fera même un acte de justice, en foi de quoi j'ai dressé le présent acte aux dits jour et an que dessus. "
fr Allix fr Tousst Outin, fr Broncquart fr H Hubert

Mais que s'est-il passé exactement à Ouezy. Les habitants ont détruit le colombier du prieuré, coupé les récoltes de la ferme. Jumièges décide d'aller en justice.

Suite de la même affaire


Ce jourd'huy, 14e jour d'août 1789, le chapitre assemblé le RP Prieur a lu une lettre du fermier d'Ouezy surpris de ne pas avoir de réponse à sa première lettre qui annonçoit la révolte des habitans d'Ouezy, la destruction du colombier, la récolte coupée, sur laquelle et avait été arrêté le 8 du présent qu'il seroit autorisé à les poursuivre. Par celle cy il nous prévient que les révoltés ont passé outre à la clameur de haro. Arrêté d'écrire à M. Jarry, avocat à St Pierre sur Dive de prendre nos intérêts et de défendre. en foi de quoi j'ai dressé le présent acte aux dits jours et an que dessus.
fr Allix, fr h Hubert fr Tsst Outin J Bronquart

Repentir à Ouézy, Jumièges temporise


Ce jourd'huy 26 août 1789, le R P dont P. A. Bride prieur de la dite abbaye ayant fait assembler la communauté vers les huit heures du matin au son de la cloche en la manière accoutumée lui a représenté que sur les nouvelles qu'il recevoit concernant les affaires de la paroisse d'Ouesy où les habitants se sont permis ci devant plusieurs voyes de fait et de dévastation en s'emparant des levées de notre fermier à main forte même au mépris du haro interjetté par le dit fermier et détruisant en tout ou en partie le colombier de la ditte ferme.

M. Jarry avocat en parlement résidant à St Pierre sur Dive et qui s'est bien voulu charger de nos interests pour cette affaire, auroit obtenu contre eux sentence sur requête pour les faire condamner solidairement tous et un chacun a restituer les fruits de la récolte par eux enlevés sur le dit fermier et à l'indemniser de tous les torts et pertes qu'il auroit pu souffrir tant par l'enlèvement de sa récolte que par la destruction du colombier,

le RP Prieur a exposé en sur que les dits habitans de la P.D. paroissant se repentir et demandant arrangement pour les dévastations par eux commises il étoit à propos d'envoyer quelqu'un de la communauté avec pouvoir d'arranger et pacifier les choses pour éviter les suites dangereuses qu'une procédure pourroit occasionner aux dits habitants après s'être permis de pareils excès au mépris des lois

pour cet effet la communauté s'est déterminée à envoyer le Rév. P. procureur pour, par lui et conjointement et de l'avis de M. Jarri, avocat, arranger et pacifier les choses de façon cependant que le fermier soit indemnisé entièrement par les délinquants de toutes pertes et de tous frais faits soit en son propre et privé nom, soit en celui de la communauté tant pour les récoltes enlevées que pour le colombier indüement détruit à main forte et au préjudice des dits Srs religieux, l'autorisent en tout à faire pour la communauté ce qu'elle feroit elle même si elle y étoit présente et de faire reconnoitre aux dits propriétaires qu'à tort ils ont attenté à la possession légitime et pacifique depuis et au dela de tems de droit et qu'a l'avenir ils ne se permettent plus de pareilles voies de fait,

duquel arangement le RP sera tenu de rendre compte à la communauté, le tout arrêté en chapitre et extrait par moi secrétaire le 26 août 1789.

fr Allix Fr h Hubert f: Broncquart, fr Tsst Outin.



Quelques temps après, l'abbaye de Jumièges perdra sa vieille possession. Avant de subir son propre démantèlement.

SOURCES

Document numérisé aux archives départementales par Jean-Yves et Josiane Marchand, cote 9H37, transcirption Laurent Quevilly.