LE MASCARET EN VALLÉE DE SEINE
Seine - Maritime      FRANCE
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Définition :

  • "Le mascaret est une haute vague déferlante remontant certains estuaires à marée montante et pouvant être dangereuse pour la navigation." citation du Larousse.
  • La marée, qui remonte le cours des fleuves, se heurte à leurs eaux descendantes.
  • Le niveau de l'eau augmentait soudainement de 2,5 mètres.
Arrivée du Mascaret à Tancarville
le 18 septembre 1864
d'après un dessin de M. Félix Thorigny
Collection PNRB
(copyright) Photo Alain HUON.











Quand le mascaret avait-il lieu ?

Trois conditions sont nécessaires à la réalisation du mascaret :

1 -
Il faut que le fleuve se jette dans un bassin maritime soumis à des marées de grande amplitude. C'est le cas de la Seine qui est soumise aux influences de la marée (amplitude de 7 à 9 mètres     au niveau de l'estuaire) – Pour comprendre les marées
2 -
Il faut que l'estuaire soit en forme d'entonnoir.
3 - Enfin, que le fond du fleuve remonte en pente douce.
La Seine a seulement 26 mètres de dénivellation entre Paris et la mer (365 km) !

Origine du mot :

  • Le mot "mascaret" aurait pour origine  le nom du petit village de Saint-Macaire, sur la Garonne, point le plus en amont où se manifestait le phénomène.
  • En Vallée de Seine, ce phénomène s'appelait la "barre"ou le "flot"


Comment affronter la vague ?

  • Les bacs étaient obligés de quitter les quais pour affronter la vague de face ou par l'arrière.
  • Il en était de même pour les navires.
  • Ce phénomène était très dangereux pour la navigation et les curieux, trop près du fleuve.
    Ainsi en 1810, on dénombre jusqu'à 17 échouages.
L'un des bacs de Caudebec-en-Caux, l'Union des Deux Rives a coulé à cause du mascaret.

      

Pourquoi le mascaret a-t-il pratiquement disparu ?
 

  • Le mascaret a disparu dans sa phase spectaculaire  car en 1963, l'établissement d'un nouveau chenal, le long de la digue sud a modifié l'estuaire : ce dernier n'a plus la forme d'un entonnoir.
  • Mais, si le mascaret a disparu dans sa phase spectaculaire, l'arrivée du flot se fait toujours sentir dans le port de Rouen.


Voici le phénomène du Mascaret relaté par la presse de l'époque

Article paru dans le Paris-Normandie du 8 avril 1958
Avec l'aimable autorisation de Paris-Normandie (COPYRIGHT)


       L' heureuse conjonction d'un mascaret particulièrement spectaculaire et du week-end pascal, s'est traduite, dimanche matin, par une affluence de curieux sur les bords de la Seine, dépassant les prévisions les plus optimistes.
        La plus forte "barre" passa samedi matin. Mais l'heure relativement avancée (10h) et le temps peu ensoleillé n'avaient guerre favorisé les déplacements et seulement quelques centaines de personne assistèrent au phénomène.
        Par contre, il n'est pas exagéré d'estimer à quelque 20 000 personnes la foule des curieux qui, sur plusieurs kilomètres et sur les deux rives, attendait dimanche, dès 10 h le passage de la barre, prévu pour 10 h 45.
Trois points de concentration principaux : La Mailleraye pour la rive gauche, Villequier et Caudebec-en-Caux pour la rive droite. Mais c'est sur le quai de Caudebec que se pressait le plus grand nombre. Sans doute plus de 10.000 personnes.
        Au caprice d'un ciel nuageux, le soleil venait, par instant faire danser le flot, que frisait un vent rescapé de l'hiver. Ce n'était, certes, pas le temps rêvé, mais il faisait "assez beau pour la saison", c'est-à-dire un temps dont les Normands ont pris l'habitude de se contenter.
        Le spectacle fut bref. La voilà ! s'écrièrent presqu'ensemble des centaines d'habitués avisés qui, depuis plusieurs minutes scrutaient en silence la courbe de Villequier. Blanche et nette, la barre s'avança lentement, inexorablement. Elle vint alors se briser sur la cale de Caudebec, en une énorme gerbe sale, trempant au passage les quelques imprudents qui avaient négligé les conseils du haut-parleur et n'avaient pas pris à temps le recul nécessaire. Ce second aspect du spectacle ne fut d'ailleurs pas le moins goûté. Du moins, de ceux qui avaient pu rester secs.

" Le flot arrive, le flot arrive ! Reculez ! " hurlait le haut-parleur. Mais ceux qui ignorent la soudaineté et la violence du mascaret ne crurent pas ces sages conseils. La vague monta, déferla, balaya le quai et une bonne vingtaine de spectateurs qui, la prochaine fois, prendront un peu plus de recul.

La barre, elle, impassible, poursuivait déjà sa route vers d'autres curieux, d'autres rivages, toujours plus en amont...
C'est là que "l'exode" commença. Dix mille personnes se ruèrent ensemble sur les 3.000 voitures qui les avaient amenées. L'arrivée, étalée sur deux heures environ s'était bien passée, sauf peut-être pour les derniers venus, qui ne trouvèrent à se garer qu'à grand-peine. Il n'en fut pas de même pour le départ. Trois mille voitures qui démarrent dans le même quart d'heure, ça se remarque! Et ça se traduit inévitablement par un embouteillage. Celui que connut Caudebec, après le mascaret de dimanche matin marquera dans les annales de la charmante cité cauchoise. A midi trente  et malgré le remarquable service d'ordre mis en place par la gendarmerie, on roulait encore  à cinq à l'heure et la traversée de Caudebec, de la mairie au bac, prenait une bonne demi-heure.
        Mais, à cette heure-là, le soleil brillait... Et en attendant de prendre le chemin du retour, les 10 000 visiteurs, faisant contre mauvaise fortune bon coeur, cherchaient déjà les mots avec lesquels ils raconteraient à "ceux qui n'y étaient pas" ce qu'est un mascaret, un dimanche de Pâques....

Jacques HUGUERRE
 

Poème d'Auguste Vacquerie

LE MASCARET

O mon village abrité
Par les collines boisées !
Oiseaux nichés aux croisées !
Verte fraîcheur de l'été !

Le miroir de l'eau répète
La tranquillité des cieux ;
Le fleuve silencieux
Sommeille... Soudain, tempête !

Sur la rive où nous causons
La vague se rue, arrache
Les pierres des quais, et crache
Au visage des maisons !

Tout tremble de sa furie.
C'est le seigneur Océan
Qui va du Havre à Rouen
Avec sa cavalerie,

Et les yeux émerveillés
Sur tout le fleuve qui fume
Voient se cabrer blancs d'écume
De grands flots échevelés.

Le vent s'éteint dans les voiles ;
L'eau s'endort ; et, tout le soir,
Du banc où je viens m'asseoir,
J'assiste au bain des étoiles.

"Mes premières années de Paris"
1877




Tableau de Turner

Peintre paysagiste anglais (1775-1861) exposé au musée Gulbenkian à Lisbonne.
Ce tableau représente l'arrivée du mascaret à Quillebeuf.
La construction du phare de Quillebeuf - 1818 – nous permet de dater le tableau d'après cette date.


Mascaret à Caudebec, 1938.



Le mascaret   devant la centrale EDF en construction – Yainville –1949
copyright : photo Paul BONMARTEL.




Le Mascaret à Caudebec-en-Caux
extrait du journal "LE PETIT PARISIEN" du Dimanche 4 octobre 1903

"C'est un spectacle, auquel une foule considérable assiste chaque année, que le mascaret de la Seine.
On se rend généralement à Caudebec, où le phénomène se manifeste le plus violemment. le mascaret est produit par la rencontre des eaux d'un fleuve et les flots de la mer. Quand la marée est moyenne, le courant du fleuve l'emporte, et il n'y a alors qu'un clapotis plus ou moins fort. Mais aux grandes marées d'équinoxe, c'est au contraire les flots de la mer qui refoulent ceux du fleuve, et il arrive alors que ces deux masses d'eau se heurtent avec une impétuosité inouïe et forment une montagne écumeuse dont la hauteur est extraordinaire.
A Caudebec, cette rencontre est d'autant plus imposante qu'en raison précisément du mascaret, qu'on redoutait jadis, le fleuve, resserré, a été encaissé de façon à protéger les riverains.
On est prévenu de l'arrivée du flot de mer par un mugissement puissant, et quand il l'emporte sur le courant du fleuve, il remonte avec d'autant plus de force qu'il a été plus longtemps contenu ; il bat les rives de ses extrémités jaillissantes et se brise au milieu en cascades, comme pour donner au fleuve le temps de masser à nouveau ses ondes afin de recommencer la lutte.
Lutte vraiment superbe et qui justifie bien l'empressement des curieux à se rendre à Caudebec pour la voir."  

UNE VICTIME PARMI TANT D'AUTRES...


Plaque commémorative sur les bords de Seine de Caudebec-en-Caux
"En souvenir de Madame LEBRETON née Jacqueline Gremont
1938- 1961
enlevée par le mascaret le 17 février 1961"

Le Courrier Cauchois dans son édition du 25 février 1961 nous donne les informations suivantes :

"LE MASCARET A FAIT UNE VICTIME : cette havraise happée vendredi alors qu'elle le contemplait pour la première fois"
Demeurant au Havre, M. Lebreton et sa jeune femme, décidait de se rendre à Caudebec. En effet, le mascaret était annoncé à 23h. Coté au coefficient 111, il était considéré comme devant être l'une des plus belles barres.
A Caudebec, ils se mêlèrent aux quelques curieux, qui malgré l'heure tardive, étaient venus assister au spectacle. La plupart des personnes présentes se tenaient à l'écart des berges du fleuve, connaissant déjà les surprises désagréables que produisent certains Mascarets. Mais M. et Mme Lebreton et leurs parents ignoraient sans doute ce détail car ils s'installèrent à côté de l'escalier de la cale aux moules, à l'endroit précis où la vague, arrivant à la vitesse d'un cheval au galop, se brise en jaillissant violemment sur l'esplanade.
Habituellement, lors des passages de JOUR, un service municipal de surveillance interdit aux visiteurs d'approcher trop près et leur demande de reculer. Mais il n'existe en principe aucun service d'ordre la NUIT. De plus il n'y avait pas d'éclairage sur les berges de la Seine : pour pallier à cette déficience, un chauffeur de car voulut bien braquer son véhicule et ses phares dans la direction d'où allait surgir le Mascaret.
Quand la barre survint, à 22h59 exactement, aucun des quatre Havrais n'eut le temps de s'éloigner. En une seconde, tous furent pris dans le flot limoneux et renversés. Mme Lebreton, qui s'était abritée sous le manteau de son mari et lui tenait la main jusqu'alors, lui lâcha la main. M. Lebreton fut blessa aux mains et à la jambe mais quand il se releva il chercha sa femme. Il ne la vit pas, l'appela mais ne reçut aucune réponse.....
Selon plusieurs témoins, la malheureuse en perdant l'équilibre avait tenté de s'agripper, mais la vague déferlante s'était refermée sur elle et l'avait emportée.
A l'heure où était imprimé cet article de presse, le corps de la jeune femme -qui était enceinte- n'avait toujours pas était retrouvé...."

"VOYAGE HISTORIQUE ET PITTORESQUE DU HAVRE A ROUEN EN BATEAU A VAPEUR"
par Morlent - 1836 Voici un extrait "la barre en SEINE"
 
"Cet effrayant phénomène, c'était la barre, monstre marin redoutable, auquel tous les ans la Seine immole des victimes. Tantôt elle se montre vers Grestain, tantôt sous la grève d'Orcher, quelquefois sur une seule rive, souvent sur les deux. D'abord, elle s'annonce par un léger frémissement dans l'eau ; un petit flot s'élève ensuite ; il remonte doucement contre le courant ; déjà l'obstacle qu éprouve la barre semble l'irriter : elle murmure et se couvre d'une légère écume ; au moment où elle s'est formée, on pouvait la suivre au pas ordinaire, à présent il faut courir pour l'atteindre. Contrainte et resserrée au milieu des passes étroites des bancs, elle paraît s'indigner des nouveaux obstacles qui gênent son passage ; un bruissement la précède, sa rapidité devient bientôt celle d'un torrent ; imposant et superbe, un mugissement tumultueux signale sa marche. Ses vagues couronnées d'écumes élèvent leurs ailes inégales : elles semblent obéir à des vents sous-marins. Arrivée sur les bancs de Quillebeuf, elle se déroule avec fracas au milieu d'eux. Bientôt elle occupe tout le passage, trop étroit pour le volume d'eau qui la suit ; elle remonte à contre-courant, pousse tout ce qu'elle trouve devant elle, frappe indistinctement les objets qu'elle rencontre, détruit les portions angulaires des terres qui l'arrêtent, inonde les prairies, dévore les îles ou en forme d'autres et consterne le cultivateur dont elle engloutit les possessions, en portant partout la désolation et l'effroi.
Cette barre terrible pour les navigateurs a pour cause le refoulement des eaux de la Seine par le flot de la marée montante ; c'est à l'époque de la pleine ou la nouvelle lune et des équinoxes, qu'elle est le plus à craindre : malheur aux marins qui oseraient alors braver sans le secours d'un pilote ! Ils périraient infailliblement. Le passage ne dure ordinairement qu'un quart d'heure, mais il inspire tant de frayeur, que le temps parait d'une longueur insupportable.
Telle est la barre que rencontrent les navires qui viennent de Rouen..".

Mémoire du fleuve

REVIVEZ CE PHÉNOMÈNE SPECTACULAIRE...
  • Depuis 1987, le MUSÉE DE LA MARINE DE SEINE, situé à Caudebec-en-Caux (Seine-Maritime), propose un audiovisuel d'une quinzaine de minutes.
Audiovisuel unique qui vous fera revivre ce phénomène...
"spectacle naturel qui jouait à bureau fermé pour chaque équinoxe"
L'Homme a toujours cherché a comprendre l'origine du phénomène.
 Déjà au VII ème siècle,  "La Vie et les miracles de Saint-Romain" propose une description du mascaret....
En 1802, l'ingénieur Noël énonçait les "principales caractéristiques du mascaret ou barre."
Retour vers les années 1960 à travers des films de l'époque....
"Un mascaret sans linge à sécher était un mascaret raté..."



"LA SEINE AU TEMPS DU MASCARET"
                   par Jean-Jacques MALANDAIN
                   Publication parue dans le Chasse-Marée
                   Édition de 1988 - N°34, pp 30-45

J.-J. MALANDAIN a travaillé le sujet du mascaret à
                    l'époque de la création du Musée de la Marine de Seine de Caudebec-en-Caux. Ces recherches ont donné lieu à la publication de l'article du Chasse-Marée de 1988.
      Ingénieur à l'Université de Rouen, l'auteur développe des sujets très techniques (influence de la Lune sur les marées ;  les ondes solitaires et les conditions de formation ; recherche historique sur le phénomène etc...). Il nous livre aussi les combats de l'homme pour lutter contre le phénomène.  De nombreux croquis et  photos illustrent ses propos.

                              Originaire de Caudebec-en-Caux, l'auteur a surfé avec le mascaret.
                                                    Il a jeté l'ancre à l'Université de Rouen...
                                       et attend vos réactions et questions à l'adresse suivante :
                                                   Lien aujourd'hui obsolète

NDLR : cet article fut rédigé en 2001. Les adresses électroniques et liens figurant ici sont donc aujourd'hui obsolètes. Nous laissons cependant ces textes d'origine qui montrent l'intérêt manifesté à l'époque à l'égard du phénomène du mascaret...


Pour "naviguer" sur les mascarets en FRANCE :
     
  • mascaret sur la Seine :  (lien aujourd'hui obsolète)
    • L'école de Saint-Ouen vous invite à la lecture des mémoires de Prudent PREVOST "Souvenirs sur la Seine"
       
  •  mascaret sur la Gironde : (http://mascaretgironde.free.fr/)
    •  
      Une seule adresse pour surfer sur tous les mascarets à l'étranger :
rédaction en anglais par Hubert CHANSON,
professeur en hydraulique, mécanique des fluides et sciences de l'environnement
à l'Ecole d'ingénieur de génie civil de l'Université de Queensland (Australie)
  •  en ANGLETERRE : sur la Severn
  •  au BRESIL : sur le fleuve Amazone : (LE POROROCA = mascaret)le plus volumineux (canal del Norte) : 16 km de large à l'embouchure de l'Amazone ; il remonte à 1000 km à l'intérieur des terres.
  • en INDE : sur le fleuve Gange : bras de Hoogly = le plus rapide soit 27 km/heure

  • en CHINE :  sur le fleuve Qiantangtjiang : 7,5 mètres de haut, audible à 22 km
  • au CANADA : Baie de Fundy (à l'est) et Golf de Cook (à l'ouest).

  • en AUSTRALIE : entre MacKay et Rockampton, dans le Queensland.
 Dossier crée par SEQUANA-NORMANDIE
Août 1999
modifié le 07/10/2001





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© Nathalie Lemière




















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