Enquête généalogique


Jean-Louis Coudray nous venait du Mont-aux-Malades. Après les faits qui lui seront reprochés, on ne trouvera pas nom de paroisse plus indiqué, tant son crime fut nauséabond. Il brisa la vie d'Honorine Godeau...

Avant d'en venir au personnage qui nous intéresse, venons-en à ses parents. Louis-Pierre Coudray avait épousé Angélique Cauvin en la paroisse de Saint-André-Hors-la-Ville, à Rouen, le lundi 5 mai 1783. Tous deux étaient domestiques chez Madame de Bellemare de Glos, sur les boulevards de Cauchoise. Cette cohabitation sous un même toit s'était traduite par un début de grossesse. D'où cette cérémonie. Le marié a 20 ans. Et si sa mère porte le nom de Marie d'Amberville, la particule est roturière. On a affaire à d'humbles journaliers, telle est la condition du père du marié, Pierre Coudray qui du reste n'a pu venir à ces noces et a donné son consentement à Maître Varengue, notaire royal au baillage de Neufchâtel. La famille Coudray est originaire de Bosc-Béranger. 

Quant à la mariée, ses racines sont au Trait. Son père, Jean Etienne Cauvin, y est mort voici 20 ans. Une mesure de tutelle avait alors été prononcée pour Angélique, son frère aîné et ses deux sœurs. Aujourd'hui, sa mère, Marie Marguerite Ponty, est donc venue du Trait pour donner son consentement. Il y a là Marin d'Amberville, scieur de long, de Saint-Gervais, Adrien Hérupé la Ronce, maître serrurier, Jean Augustin Brunel, de l'auberge Tichan où pend l'enseigne de la Petite Notre-Dame, Antoine Pinchon, bourrelier, Nicolas Duboc, ouvrier toilier. Belle brochette d'artisans...

Marchand au Mont-aux-Malades

Le couple Coudray s'extirpa très vite de sa condition de domestique. Louis-Pierre se fit marchand de coton. Et c'est au Mont-aux-Malades, six mois seulement après le mariage, que vint au monde une première fille, Angélique. Les parrains furent Charles Clouet, fils d'un défunt bourgois de Saint-André et Marguerite Duboc, fille du maître toilier Jean Duboc, de la paroisse de Saint-Gervais-lès-Rouen.
24 octobre 1784, Louis Pierre est dit débitant de coton quand naît une seconde fille, Louise Aimée. Le parrain est Louis Amable Duboc, fils de Michel, maître toilier de Saint-Gervais, la marraine  Marie-Louise Saulnier, femme Boissard, fabricant de Saint-Maclou..
Et voici un garçon, Louis Michel, le 1er novembre 1785. Parrain: Louis Michel Boissard, le fabricant samoisier de Saint-Maclou, marraine : la femme Le Cœur, épouse d'un maître toilier de Saint-Gervais.

Enfin, voici Jean-Louis, celui par qui le scandale arrivera. Il naît le 19 août 1787 au Mont-aux-Malades. L'enfant a pour parrain Jean-Claude Duboc, fils de Jean Duboc, maître fabricant de la paroisse de Saint-Gervais.

L'acte de naissance de Jean-Louis Coudray.

On le voit, les Coudray baignent dans les milieux de l'industrice textile rouennais alors que le commerce du coton a le vent en poupe. C'est alors qu'ils décident de quitter les faubourgs de Rouen pour s'installer au Trait, pays d'origine de la famille Cauvin.

La vie au Trait

Composée de trois générations sous un même toit, la famille va vivre au Trait durant une dizaine d'années. Là, Louis-Pierre Coudray poursuivra son métier de marchand tandis que sa femme, Angélique Cauvin, accouchera encore de six enfants. 

Lorsque les Coudray s'installent au Trait, un fils leur vient en octobre 1788 qui ne passera pas l'année. Puis c'est une fillequi, née dans la nuit du 23 avril 1790 est ondoyée de toute urgence, étant en péril de mort par la sage femme, Marie Guillemare, veuve de Pierre Delaunay. Au matin, elle ira en la chambre commune déclarer cette nuit agitée, assistée de Rose Hardy, épouse Louis Delaunay et Angélique Cauvin, veuve de Nicolas Tiphagne. Les Tiphagne sont en effet alliés aux Cauvin et cette famille donnera deux maires au Trait.

 Car entre temps, la Révolution a éclaté. Qui libère les énergies. Louis-Pierre Coudray entretient des relations d'affaires avec les Palfrène de Canteleu. L'un, Antoine, teinturier, parraine une fille Coudray, Emelie, en 1791. Sa commère est Thérèse Monot, épouse de Louis Jacques Palfrène, fabriquant. Ce dernier créera bientôt une fameuse manufacture de mouchoirs à Cambrai.

Localement, Louis-Pierre Coudray a dans sa coterie les Cauvin du Trait dont est issue sa femme et qui, plus tard, exploiteront une carrière, il fréquente les Leroy, les Delaunay... A Saint-Paër, il a pour ami Jean Pierre Morel, un marchand laboureur dont la femme, née Braquehais, est également choisie pour parrainer une autre fille, Alexandrine., née le 28 juillet 1792.
Une nouvelle fille, Marie Reine, vient au monde le 13 pluviose de l'an 2 (1er février 1794). Vont déclarer la chose en mairie Jacques Joseph Tiphagne et Marie Reine Rolain, femme de Jean Nicolas Tiphagne. Tous sont laboureurs. La famille Rolain, qui tient les carrières d'Yainville, donnera deux maires à cette commune. Louis-Pierre Coudray avait du reste été témoin du mariage Tiphagne-Rolain en 1791.

Le 12 germinal de l'an 2 (1er avril 1794), Louis-Pierre Coudray se porte acquéreur de biens de l'émigré Montmorency-Luxembourg. A savoir, sur la commune de Rouville-Bielleville, la ferme du parc d'Hallebosc, soit 140 ares en masure, labour et bois, vendue 160 000 livres et deux labours en dépendant (40 ares) pour 55 000 livre. Ainsi, le fils de journier, l'ancien domestique d'une noble s'offrait-il une parcelle ayant appartenu à un membre de la haute aristrocratie.

Le 11 ventôse de l'an 4, (1er février 1796), Louis-Pierre Coudray se rend au chef-lieu de canton pour obtenir un passeport révolutionnaire. On le dit âgé de 34 ans, originaire de Bosc-Béranger et résidant au Trait depuis neuf ansC'est un homme de 5 pieds 6 pouces, cheveux et sourcils châtain, yeux bleus, nez aquilin, bouche moyenne, menton fourchu, front large, visage plein, teint coloré.
Effectivement, appelé par ses affaires, Coudray est absent du Trait quand naît encore une autre fille, Sophie, le 27 ventose de l'an 4 (17 Mars 1796). Elle a pour protectrice spirituelle Sophie Dinaumare, la fille de l'ancien régisseur de l'abbaye de Jumièges qui joue un rôle de premier plan depuis la Révolution . Le parrain est Bruno Cousin, commerçant à Rouen. On a fait appel à la sage femme de Duclair, la citoyenne Jeanne Charlotte Beurier.

A Sainte-Marguerite


La famille Coudray se déplaça ensuite à Sainte-Marguerite-sur-Duclair. C'est toujours la Révolution. A la communale, le petit Jean-Louis, 11 ans, et sa sœur Emelie, 7 ans, reçoivent l'enseignement de Nicolas Béard, curé défroqué qui finira par retrouver la vocation. 

Voilà un nouveau garçon : Eléopauld (Léopold, rectifiera plus tard le curé de Duclair). Il naît  le 26 vendémiaire de l'an 6 (17 octobre 1797) et ce sera le dernier né. Le père est toujours marchand et dit propriétaire. En mairie, il est accompagné des citoyens Augustin Colin de Rouen et Marguerite Félicité Blondel, épouse Caron.

Le 28 germinal de l'an 6 (17 avril 1798), Louis-Pierre Coudray revient de Duclair avec un nouveau passeport. Dans le cadre de ses activités commerciales, ce précieux sésame lui permettra de se rendre à Caen, Alençon... Coudray est dit résider à Sainte-Marguerite depuis 18 mois. Là nait, en 1800, une nouvelle fille, Marie-Françoise. Coudray se rend à la mairie flanqué de deux femmes : Marie Marthe Le Dain, femme Lebourgeois et Marie Anne Ponty, femme d'Annery. Ce sont des parentes. Hélas, l'enfant mourut à 16 mois. Un domestique et la grand-mère de la défunte, fileuse de son état, déclarèrent le décès. Coudray semble s'adonner désormais à l'agriculture.

Notables à Duclair

Enfin les Coudray déménagent pour Duclair où la vie leur réserve de nouveaux deuils : le grand-père qui meurt, encore une fille qui disparaît, Emelie, à 19 ans. Au chef-lieu de canton, Louis Pierre se fait laboureur.

A 21 ans le fils aîné des Coudray, Jean-Louis, inspirait une confiance sans faille. C'est si vrai que le 20 octobre 1808, un couple de journaliers du Vaurouy n'hésite pas à le choisir pour parrainer une fille, Pauline Honorine Godeau. Devant l'abbé Richer, le jeune Coudray remplit donc parfaitement son rôle aux côtés de Marie Marthe Lecouteux, issue d'une famille de propriétaires aisés à Sainte-Marguerite-sur-Duclair. Elle a la vingtaine elle aussi et forme un joli parti. Mais cette considération s'arrêtera là. Jean-Louis Coudray ne songe pas à se marier. Comment le choix s'est-il porté sur lui ? Le père de l'enfant baptisée, Michel Simon Godeau, n'a pas de parents proches dans la région. Il était originaire de la Ferté-Gaucher, dans la Seine-et-Marne et a épousé Marie Marguerite Cauchois à Saint-Paër le 24 floréal de l'an 12. Journaliers, les Godeau étaient-ils au service des Coudray ? Possible. Ils resteront en tout cas physiquement proches...

L'acte de Baptème de Pauline Honorine...

Dix années passent. A l'Empire a succédé la Monarchie et Jean-Louis Coudray, toujours célibataire, rend grosse Victoire Capelle. Vite, on décide de les unir devant l'abbé Richer. La cérémonie a lieu le 15 janvier 1818. Le marié et son père signent d'une écriture assurée, Victoire d'un paraphe appliqué. Les autres tracent une croix.

Quatre mois à plus tard, la jeune épousée accouche d'un garçon que l'on prénomme Louis Désiré. Louis pour le père. Désiré, en revanche, n'était peut-être pas le prénom le plus approprié. Mais bon, avec un premier enfant, fut-il très prématuré, une destinée banale s'annonce pour le couple...

Quand tout bascule...

Seulement, l'année 1821 sera très noire, chez les Coudray. D'abord Alexandrine, une sœur de Jean-Louis, accouche d'une fille hors mariage le 7 janvier, à Sainte-Marguerite. Le géniteur n'en fait pas mystère et va déclarer l'enfant en mairie. C'est un journalier, Jean Guillaume Autin, natif de Caudebec. 

Et voilà que le 17 mars, le père des Coudray rend l'âme. A 58 ans. L'abbé Richer précisera que l'inhumation a lieu en présence de "deux enfants sousignés : Coudray, Tiphagne." On reconnaît effectivement le paraphe de Jean-Louis, semblable a celui qu'il avait dessiné pour son mariage. Quant à Tiphagne, il s'agit sans doute d'un beau-frère.

59 ans ! C'est tout de même un peu jeune pour mourir. Un événement funeste a-t-il précipité mort du père Coudray ? Elle intervient à l'époque des faits qui seront reprochés à son aîné alors âgé de 35 ans et exerçant lui aussi la profession de cultivateur. Les faits ? Aux Assises de la Seine-Inférieure, on reconnaît Jean-Louis Coudray "coupable de viol commis dans les premiers mois de 1821 sur une jeune personne âgée de 12 ans et dont il était le parrain."  Eh oui, Coudray a abusé de la petite Pauline Honorine Godeau, sa filleule. Ce jugement intervient le 14 mars 1822 et le violeur est condamné à cinq années de travaux forcés. C'est peu à l'égard d'un tel crime. Mais toujours assez pour le flérir voire l'expédier ad patres tant les conditions du bagne sont terribles. D'autant que les violeurs d'enfants n'y sont pas particulièrement les bienvenus.

Que sont-ils devenus ?

Que devinrent maintenant les différents protagonistes de ce drame ? 

Chez les Coudray. Comme nous le verrons, Jean-Louis Coudray ne reparaîtra jamais dans le canton de Duclair. L'année même où il fut conduit au bagne, sa sœur Alexandrine régularisa sa situation de fille mère en épousant, le 14 décembre 1822, Jean Guillaume Autin, son amant. Le journalier était devenu entre temps charpentier. Le couple reconnut ce jour-là l'enfant né de ses œuvres.

Le 17 janvier 1822, la fille aînée des Coudray, Angélique, accouche elle aussi d'une enfant hors mariage. Sa sœur Sophie joue la marraine. Le 10 février 1823, la mère célibataire, déjà bien avancée en âge, 40 ans, épouse à Duclair Nicolas Eusèbe Maréchal.

Veuve, la mère du bagnard et de ces deux pécheresses resta demeurer à Duclair malgré, on s'en doute, les regards en coin voire pire. Angélique Cauvin y mourut à 68 ans le 30 mars 1825. Le lendemain, l'abbé Richer procéda à l'inhumation "en présence des enfants qui ont dit ne savoir signer." Seul Jean-Louis le savait. Il l'avait démontré au baptème de sa filleule, à son mariage et à la mort de son père. Mais en 1825, le signataire était au bagne depuis trois ans. 

L'année suivante, le 2 février 1826, c'est Louise Aimée, la seconde fille des Coudray, 42 ans, qui épouse un veuf à Duclair, Jean Baptiste Patin. Elle vient de Saint-Vincent de Rouen. 

Le 2 juillet 1826, encore un enfant Coudray, Léopold, journalier à Duclair, qui épouse Marie Anne Maréchal.

Chez les Godot. Les Godot, parents de la victime, eurent la consolation de marier, le 23 juin 1827, l'une de leurs filles, Marie-Anne Scolastique, alors servante, au charron de Sainte-Marguerite, natif de Saint-Paër, Modeste Ferdinand Duquesne. Scolastique est née le 15 pluviose de l'an 13 (4 février 1805).

Les Godot attendirent dix ans avant de marier une seconde fille, Marie Antoinette, née en 1812, avec Samson Léonce Reniéville, à Epinay. 

Après quoi, au hameau du Roncerai, Michel Simon Godot, le père de la petite fille violée, décéda  le 19 février 1839, à 4 h du matin. Toujours journalier, il avait 68 ans. Antoine Ponty, un homme de sa condition et Modeste Ferdinand Duquesne, charron et gendre du défunt signèrent l'acte de décès en compagnie du maire, le sieur Frémont. 

Les années passaient et Honorine Godot, la victime du viol, demeurait célibataire. Cette solitude venait-elle d'une hantise des hommes où d'un jugement infamant porté sur elle ? 

Tandis qu'Honorine portait sa croix, le fils de son violeur avait trouvé épouse à son goût. Louis Désiré Coudrray avait trois ans quand se sont déroulés les faits perpétrés par son père. Il aura grandi avec son ombre, des non-dits, de la honte. Le 13 janvier 1840, à Ecalles-Alix, il épouse Hortense Louise Lenormand, une tisserande native d'Ectot-lès-Baons. Fille mère, elle est orpheline de père et sa mère, bobineuse, est présente. Résidant à Croix-Mare, Louis Désiré exerce quant à lui la profession de marneur. L'officier d'état-civil n'est guère habitué à ce genre d'acte. Avec pudeur, il écrit de l'époux : "fils mineur de Jean-Louis Coudray, absent de son domicile depuis environ 17 ans, ainsi que nous l'ont attesté par serment les quatre témoins ci-après nommés et qu'il résulte d'un certificat en date du 7 janvier dernier délivré par M. le maire de Duclair, aussi attesté par quatre témoins domiciliés dont trois à Duclair et un à Saint-Paër, le sieur Jean-Louis Coudray, domicilié à Duclair lors de son départ, et de Marie Anne Victoire Capelle, âgée de 63 ans, fileuse, domiciliée à Croixmare, présente et consentante au mariage..." 
Les témoins du mariage furent deux garçons de Croix-Mare pour l'époux : Joseph Maigran, tisserand et Julien Jourdain, poissonnier, 25 et 26 ans. Pour l'épouse : Augustin Lenormand, son frère, marneur et Isidor Beaufils, un ami de l'épouse, 22 et 30 ans. On ne connaîtra pas ceux qui témoignent dans le certificat du maire de Duclair. 
Le couple Coudray s'installe bientôt à Motteville, au hameau de Runetot. Dont descendance. Six garçons ! Louis Désiré y devient journalier. Ses enfants le seront aussi. Mais certains se feront entrepreneurs de travaux publics. La lignée des Coudray reprenait vie.

Enfin Honorine se marie

De Sainte-Marguerite, Honorine franchit un jour la Seine pour s'installer à Anneville où elle se fait domestique à gages. Là, le 8 janvier 1852, elle se marie enfin. Romain Frédéric Després est un Jumiégeois bon teint venu voici des lustres s'établir ici comme cultivateur. Il est veuf depuis seulement 10 mois de Rosalie Perpétue Moulin de qui il a eu plusieurs enfants. Després a déjà 48 ans quand Honorine en compte 43. Le jour des noces, la mère de la mariée, Marie Anne Cauchois, vint de Sainte-Marguerite donner son consentement. On fit aussi état d'un contrat avait été établi chez Me Rigoult, notaire à Duclair. 
Honorine avait traversé seule sa vie de femme féconde. Mariée à présent, l'âge ne lui permettait plus guère d'enfanter. Mais la chance lui sourit. Le 4 novembre 1852, année de son mariage, elle accouche à 2 h du matin d'un garçon qui fut prénommé Ernest-Emile. Le forgeron du village et un vannier furent les témoins en mairie de cet heureux événement.

Sa fille étant mariée et mère de surcroit, Marie Anne Cauchois, veuve Godot, trépassa le 6 novembre 1854 à Sainte-Marguerite. On ne sait qui déclara son décès, les registres ont disparu...

Les contemporains du viol disparaissaient peu à peu. En 1857, Léopold Coudray, le jeune frère du coupable, meurt à Duclair. Le 7 février 1863, une sœur, Alexandrine Coudray, épouse Autin, s'éteint aussi au hameau du Val de la Mare. Les témoins furent les sieurs Baudry et Vignerot. Dix ans plus tard, le fils du violeur, Louis Désiré, toujours journalier, meurt à Motteville. Il a perdu sa femme voici trois ans alors que le couple habitait Maromme. Ils n'auront pas atteint la soixantaine. On dit Louis Désiré fils de "feu Coudray Jean-Louis et de feue Capelle Marie Anne Victoire"... Feu Coudray ! Est-ce à dire que l'on connaît officiellement la fin du bagnard évaporé dans la nature ? 

Et à nouveau l'enfer

Honorine avait eu la consolation de mettre au monde un fils. Mais son ménage avec Després ne dura guère. Veuve, elle se retrouve seule avec le jeune Ernest-Emile. Il sait lire et écrire. Il aime aussi compter. Le 16 janvier 1868, à 15 ans, il est condamné à Rouen pour un vol de 50 F et d'objets mobiliers. Il nie pour ces derniers. Mais il est envoyé en maison de correction jusqu'à ses 20 ans. 
Revenu à Sainte-Marguerite, domestique, il se met au service du couple Breton, devient l'amant de la femme et, avec sa complicité, tue le mari. L'affaire dite de la "Vénus de Sainte-Marguerite"  retentit jusqu'au niveau national. Ernest-Emile Després est condamné le 14 février 1878 pour homicide volontaire aux travaux forcés à perpétuité. Arrivé au dépôt le 10 mars, il fut écroué sous le numéro 4449. C'était un garçon d'1,63 m, les cheveux châtain, le front couvert, les yeux gris, le nez ordinaire, la bouche moyenne et le menton rond, un visage ovale et le teint ordinaire Il avait une légère cicatrice sur le cou.... Au bagne de Nouméa, il apprend le métier d'effilocheur et fait preuve de bonne conduite. Mais il décède à l'île Nou, le 12 avril 1878. Diarrhée chronique, dira l'administration pénitencière.

Le 11 décembre 1882, Honorine trépassa en son domicile au hameau de Glatigny, à Sainte-Marguerite. Elle avait 74 ans et était qualifiée de ménagère. Les sieurs Martin Thierry, cultivateur et Dominique François Blondel, amis de la défunte, signèrent l'acte de décès avec le tonitruant maire du cru, Joseph Foucault.  Ainsi s'acheva la vie misérable de celle qui, enfant, fut violée par son parrain.

Laurent QUEVILLY.


Sources :

Registres de condamnations 2 U 1365 et 1367,  relevés de François Grandpierre.

Archives nationales d'Outre-Mer.

BMS archives de la Seine-Maritime.




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