C'est à Duclair puis Jumièges que naquirent nos toutes premières fanfares. Histoire de la musique populaire dans le canton de Duclair.

Mais d'abord, comment s'exprimait jadis la musique à Jumièges ? Par les cordes vocales des moines qui disposaient de fabuleux manuscrits. Elle descendait aussi de l'orgue de l'abbaye, niché entre ses deux tours et tenu avant la Révolution par les Foutrel père et fils . Nicolas-David, le dernier à gravir l'escalier, fut considéré en son temps comme l'un des meilleurs instrumentistes de la région. On ne sait si cette qualité lui valut d'être maire de 1798 à 1800. C'est en tout cas un défaut qui lui valut d'être écarté : du Seigneur, il affectionnait particulièrement les vignes...

La musique dans le canton, on en garde des échos venus des temps les plus recultés. Sur un châpiteau de l'abbaye de Boscherville figurent des ménestrels. Un membre de cette confrérie fut du reste assassiné dans ce village en 1432. Savez-vous que Louis XIII, enfant, chantait une ritournelle où il est question de Duclair ?

Les gardes nationales

A la Révolution, la garde nationale de Jumièges eut son tambour en la personne de Joseph Hauriolle, maçon picard, dénonciateur à ses heures. Il inaugura la loi sur le divorce en répudiant son épouse pour avoir le bonheur de la réépouser dès le lendemain. C'est lui qui ouvrait l'église paroissiale et sonnait la cloche aux aurores. Dans nombre de communes, comme à Duclair, les gardes nationales auront leurs fifres et tambours puis les corps de sapeurs pompiers au fil de leur création. Celui de Duclair fut créé en 1786.

Les violoneux

Le soir de la Saint-Jean, lors de la fameuse cérémonie du Loup Vert, on entendait toujours un vieux du pays entonner la si jolie chanson du cru : "Marchons joli cœur, la lune est levée..." Un violoneux l'accompagnait. Après quoi, la jeunesse dansait autour du feu. Ce ménestrier, il est encore attesté dans les années 1830, époque où naissent en France les premiers orphéons. Après les déchirures de la Révolution, de l'Empire, de la Restauration, ces ensembles vocaux tentent de faire renaître l'esprit de la fête de la Fédération, quand des milliers de voix entonnaient des chants patriotiques. 

Et peu à peu les cuivres des orchestres militaires vont s'imposer en force au détriment des instruments traditionnels. 

L'esprit associatif




Les pompiers de Boscherville ont eu aussi leurs tambours et clairons. On en compte cinq sur cette photo.
Le seul civil est Georges Andrieux qui fut maire de 1892 à 1902. L'image date donc de cette époque.

Au XIXe siècle, l'esprit associatif se développe. A Jumièges, sur le plan religieux, il se manifeste déjà depuis des lustres au travers de trois confréries de charité. Sur le plan laïque, depuis la Révolution, les hommes se retrouvent au sein de la garde nationale qui rehausse de sa présence le lustre des manifestations patriotiques, l'installation des maires. 

A Duclair, les musiciens de la garde nationale donnent un bal au profit des pauvres le jeudi de la Mi-Carême 1834. La bonne société du cru s'y presse et quelque 260 F sont versés au bureau de bienfaisance.

La chanson populaire se développe alors. En 1853, le presbytère d'Yainville accueille un curé-chansonnier, l'abbé Houlière, auteur d'un tube. Cent ans après sa mort, au fin fond de la presqu'île, on chantera encore Noter-Dame d'Autertot.

Et voilà que le 12 juillet 1853 est créé un premier corps de sapeurs pompiers à Jumièges. Il est fort de 26 hommes sous les ordres de Valentin Poisson. C'est dans le même esprit que va naître la fanfare de Jumièges quinze ans plus tard...

Lorsque se tient un comice agricole à Duclair, en 1854, le sous-préfet est escorté à son arrivée par "la musique et par la compagnie des sapeurs-pompiers", nous dit le Journal de Rouen.

Duclair comptait déjà une société musicale en 1862 car nombre de musiciens figurent parmi les souscripteurs à une liste du Prince Napoléon en faveur des enfants au Travail. On note en effet Nicolas Lefèbvre, "sous-chef de musique", François Lefèbvre, Jules Delu fils, Albers Lencs, tous musiciens...

La Cécilienne

1863.La fanfare la Cécilienne naquit à Duclair en 1863 sous la baguette de Léon Huguerre, un fabriquant d'ouate venu s'installer chez nous. L'homme est né en 1841 à Écretteville-lès-Baons d'une grande famille de fabriquants de rouenneris descendants de tisserands.
La Cécilienne fut la mère des fanfares du canton. Une de ses premières sorties hors Duclair fut pour un concours à Saint-Denis en mai 1864 où elle décroche une médaille d'encouragement. Après quoi, elle se rend Jumièges en juillet 1864 où elle va faire des émules :

La Société Cécilienne de Duclair a exécuté, dimanche dernier, dans la vaste église de Jumiéges, une messe en musique, à l’occasion de la fête de saint Pierre.
Avant et après la messe, les membres de cette société, si bien organisée parM. Mouchelet, son président d’honneur, et M. Huguerre, son chef, sont allés faire visite à M. Lepel-Cointet, maire de Jumiéges, qui leur a fait les honneurs de sa magnifique propriété.
Différents morceaux d’harmonie ont été exécutés avec un ensemble et une perfection qui ont fait le plus grand plaisir à tous les auditeurs, sur la place de la Mairie, dans les ruines et dans le beau parc de M. Lepel-Cointet.
Les membres de la Société Cécilienne ont terminé leur visite par une bonne action en faisant entre eux, à la fin d’un frugal repas, une collecte dont le produit a été distribué aux pauvres. Afin de répondre dignement à cette manifestation, M. le curé et M. le maire se sont entendus pour offrir à la Société Cécilienne une médaille commémorative. Celle médaille viendra bientôt s’ajouter à celles qui sont déjà remises sur la riche bannière que nous avons vue dignement portée par M. Vauquelin, l’un des plus zélés fondateurs de la société.

Il est à penser qu'il s'agit de Louis Vauquelin, natif de Duclair, d'abord établi comme cultivateur au Mesnil puis hôtelier au bourg de Jumièges.


De marque Couesnon & Cie, le clairon de mon père...

Nous retrouvons la fanfare en août 1864, lors d'un spectacle de charité à Duclair où elle associée à l'harmonie de Dieppe et plusieurs chanteurs lyriques puis lors des régates de Caudebec en septembre. Elle fête en fin d'année la Sainte-Cécile à l'hôtel de Rouen tenu par la veuve Mellon et donne un concert au profit des pauvres. Une constante. Une catastrophe en Guadeloupe ? On retrouvera inévitablement la Cécilienne parmi les souscripteurs.

En décembre 1865, le presse nous parle encore de nos généreux fanfarons : La société Cécilienne de Duclair a fait don à la société du Prince Impérial d'une somme de 229 fr. 65 c., produit d'un concert donné à Duclair le 26 novembre dernier.

Mai 1866 : L’administration municipale et la société Cécilienne de Duclair, s’occupent de l'organisation d’une grande fête musicale, dont le produit doit être consacré au rachat de la tour de Jeanne D'Arc et a l’érection d’un monument en son honneur.
M. V Dubouchet, d’Yvetot, violoniste | distingué, dont le charmant talent, dit le Nouvelliste, a déjà été apprécié à Duclair,  sera l’un des principaux directeurs de la partie instrumentale.

L'ancêtre du Rappel

Sitôt sa création, la Cécilienne est en compétition. Juin 1866 : 2e prix au concours d'Yvetot. Juillet 1866 : concours de Boulogne-sur-Mer.
En août, à Luneray, la presse spécialisée constate ses progrès ainsi que ceux des musiciens locaux et de Pavilly. Ce festival de Luneray est au profit du rachat de la Tour Jeanne-d'Arc. Une vingtaine de société musicales y sont présentes dont la Cécilienne mais aussi la "Musique municipale de Duclair" dirigée par M. Lefèbvre. Elle compte 15 exécutants contre 14 pour son homologue. Attestée avant la création de la Cécilienne, cette Musique municiale est manifestement composée par les pompiers de Duclair et préfigure le Rappel.

Le 15 août 1866 a lieu une fête traditionnelle : Te deum, messe en musique, revue de pompiers, jeux publics agrémentés par la musique municipale sur la place de la mairie. Le soir, c'est la Cécilienne qui donne un concert sur la Seine. Elle le donne à la dunette pavoisée et illuminée a giorno d'un steamer anglais amarré au quai et commandé par le capitaine Lachlan. A 9h et demie du soir, après le feu d'artifice, la Cécilienne offre au capitaine et son second une collation présidée par Cavoret. Lachlan porte un toast à l'Empereur et aux Duclairois, la Cécilienne à la reine Victoria et aux Anglais ainsi qu'à l'éternelle entente cordiale entre les deux peuples.

Novembre 1866 : c'est la Saint-Cécile. Fête traditionnelle elle aussi. Grand messe avec concert de la Cécilienne. A l'élévation, Onfroy, un musicien de 1ère classe du 10e cuirassiers exécute un andante au saxophone. Après quoi, les Céciliens donnent un concert dans une salle du premier étage de la mairie. Changement de local pour un banquet présidé par Berruyer. On lève alors son verre à l'Empereur, sa femme et le petit prince... Darcel, conseiller général souhaite succès au concours musical projeté l'an prochain par la Céciliène avec la bénédiction du préfet. Le président Mouchelet rappellera quant à lui l'histoire de sa Société, fondée en 1863 et dirigée par Huguerre. Onfroy donne encore du saxo. Et Cavoret, en bon président du bureau de bienfaisance, mène une quête qui rapporte 30F. 

En décembre, voici la Saint-Barbe. La compagnie des sapeurs-pompiers du capitaine Delaunay se rend à la messe, musique en tête. Lefèvre dirige encore quelques morceaux durant l'office. Puis Cavoret passe les hommes en revue place de la mairie. Après quoi banquet rythmé par force toasts portés depuis le chef de l'État jusqu'aux personnalités locales. Il semble donc qu'aux côtés de la Cécilienne coexiste une clique des sapeurs pompiers préfigurant le Rappel de Duclair.

Sainte Barbe ne fut pas sensible en tout cas à cet hommage.  Toujours en décembre, un incendie se déclara chez Léon Huguerre. Ce dernier se montra reconnaissant envers la réaction de Cavoret, du commissaire de police, des gendarmes et bien sûr des pompiers accourus aux premiers cris d'alarme. Sans oublier l'ouvrier qui, se jetant dans la Seine, revint comprimer le feu en se roulant sur les matières enflammées. Ce qui permit aux autres de circonscrire le sinistre. Pendant ce temps, une "'personne honorable" fut rudoyée par méprise.

En janvier 1867, Léon Huguerre se marie à Duclair avec Constance Appoline Devillard qui lui donnera deux fils. Cette année-là, la Cécilienne fut félicitée par le préfet pour sa prestation dans un concours international à Paris. En revanche, en octobre 1867, toujours dans la France chorale, Huguerre conteste avec la plus ferme énergie le jury du concours de Fécamp :

Huguerre, directeur de la fanfare de Duclair, repousse les injustices et les banales appréciations du jury de Fécamp, dont M. Coyon a été le rapporteur et dénonce ses fautes.
Qu’importe, d’ailleurs, la composition de ce jury ! s’agirait-il de célébrités, il n’en faudrait pas moins que la vérité se fit jour.
On connaît, dit M. Huguerre, les fautes énormes commises dans la 2e division, 2e section. Voici donc celles que j’ai remarquées dans la 3 e division, 2e section, qui est la nôtre.
Nous étions quatre sociétés : Goderville, Fauville, les Loges et Duclair. Première faute : il a été accordé le premier prix à la fanfare de Goderville, qui devait être exclue du concours. Le chef jouait de la petite clarinette, et le règlement, que le jury tenait en main, interdit les instruments en bois dans les fanfares, sous peine d’exclusion.
Deuxième faute : le jury a souffert sciemment le chef de musique de Fauville exécuter une partie de piston au concours, pendant qu’il est sous-chef et premier piston dans la musique d’Yvetot. Le règlement permet aux chefs de diriger plusieurs sociétés. Diriger, oui, mais exécuter, cela n’est pas possible. Que dirait un jury quelconque, si je faisais diriger ma petite fanfare, le jour d’un concours, par un ex-soliste du Théâtre-Lyrique?
Troisième faute : après avoir mis la fanfare de Duclair hors concours pour fausse interprétation du règlement, le jury lui a décerné un deuxième prix, ex œquo, avec Fauville. Vous pouviez nous récompenser, mais il fallait le faire à part, c’est-à-dire en dehors des prix.
Passons aux appréciations du jury, qui sont non moins amusantes que celles sur la fanfare de Bosguerard.
1° Les Loges, « cette société a tellement à faire, que le jury juge convenable de ne donner sur elle aucune appréciation. » C’est un peu décourageant pour les Loges, mais c’est si commode pour le jury.
2° Fauville, « cette société a une supériorité marquée sur ,ses concurrentes... » Et vous lui donnez un deuxième prix! ex œquo ! ce n’est pas comme Caudebec, qui n’est supérieure qu’à deux sociétés, et à qui vous accordez un premier prix.
3° Goderville, « petite clarinette et batterie de trop... » Je crois voir encore le jury tenant en main le règlement du concours de Fécamp.
4° Duclair, « assez bon style, Miserere bien joué par le baryton, nuances bien observées... on engage à changer quelques instruments défectueux, le petit bugle surtout. »
Ça, c’est du Coyon. J’ai été lui parler avec mon instrument à la main, et il l’aura reconnu pour être sorti de la fabrique de son patron. Le petit bugle de Bosguerard n’a pu en faire autant.
Hélas ! oui ! nos instruments sont défectueux ; aussi, avec mes quatorze exécutants, qui ne sont pas tous assidus aux réunions publiques, je fais, moi aussi, des arrangements à huit parties qui me permettent de doubler ces instruments et d’en obtenir des sons et meilleurs et plus justes.
Je ne terminerai pas sans adresser une petite question à M. Coyon, que je vais résoudre moi-même, afin de lui ôter la peine de s’occuper de moi. Étant donné trois ignorants : lui, M. Lamontre et moi, lequel des trois sera le maître, si ce n’est celui qui dit aux deux autres : « Vous ne connaissez pas la valeur des notes, vous êtes des corbeaux bons à croasser quand vous revenez de la chasse aux médailles, etc.»
On sait comment nous avons fait la chasse aux médailles de Fécamp, puisque nous avons refusé la nôtre. Et l’on se plaint que de pareils concours agonisent! Eu attendant qu’ils meurent,

Croyez à mes meilleurs sentiments.
L. Huguerre,
Directeur de la Cécilienne de Duclair.


On pourrait mulitiplier à l'envi les interventions d'Huguerre dans la presse spécialisée.

La Semaine religieuse, bulletin du diocèse de Rouen, donne ce compte-rendu en 1868 : "Le mardi 21 avril, Duclair présentait l'aspect le plus joyeux et le plus animé. Les fonctionnaires et les autorités s'étaient réunis pour recevoir le premier pasteur du Diocèse. En tête du cortège marchait M. le maire, ayant à sa droite M. le curé-doyen, et à sa gauche M. le juge de paix. Les pompiers, conduits par M. Delaunay, leur capitaine, formaient la haie ; la foule était compacte, la fanfare la Cécilienne faisait retentir l'air des plus beaux morceaux de son répertoire."

La même année va naître une fanfare à Jumièges.

Sous la baguette de Lafosse

1868. Ils sont quinze ! Et tous signent une lettre adressée au sénateur-préfet de la Seine-Inférieure, le 20 mai 1868 :

"Nous avons, depuis quelques temps déjà, organisé à Jumièges une société de musique instrumentale (fanfare) dont le but est de contribuer à l'éclat et à la solennité des fêtes religieuses et nationales. Notre société s'est constituées d'elle-même et elle se propose de subvenir à ses frais d'organisation et d'entretien au moyen des cotisations volontaires de ses membres et des dons, également volontaires, des personnes de bien qui voudront bien lui prêter leurs concours sans être tenues de faire partie de la dite société, à quelque titre que ce soit.
"Nous avons été heureux d'obtenir, à notre début, le bienveillant patronage de M. Lepel-Cointet, maire de Jumièges, chevalier de la Légion d'honneur, de M. Bicheray, son premier adjoint
(N.D.L.R. et notaire de Jumièges) et de M. l'abbé Prévost, desservant de la paroisse (...) 


Agent de change parisien, collectionneur, propriétaire de l'abbaye, Monsieur Aimable Lepel Cointet fut maire de Jumièges de 1860 à 1871. C'est lui qui encouragea la création de la première fanfare du canton.
"La société porte le nom de Fanfare de Jumièges et nous vous serons reconnaissants de vouloir bien l'autoriser comme vous l'avez fait pour toutes les sociétés musicales du département. Nous vous prions, Monsieur le Sénateur-Préfet, de bien vouloir agréer l'expression des sentiments les plus respectueux de vos très humbles et très obéissants serviteurs."

En marge de cette lettre, Lepel-Cointet ajoute un commentaire tamponné de l'aigle royal du cachet de la mairie : "Cette société composée d'hommes paisibles et de jeunes gens d'une excellente conduite se distingue par son zèle, son aptitude et les sérieux progrès qu'elle a faite en peu de temps. Elle mérite toute la bienveillance de Monsieur le Sénateur-Préfet." 

Les quinze fanfarons


Alors qui sont ces quinze hommes paisibles ? Le président-fondateur est Charles Grulay, l'instituteur et secrétaire de mairie, alors âgé de 35 ans. Excellente conduite ? Sever Boutard, l'un des maires de Jumièges, se souviendra d'un enseignant aimant à lever le coude pour une tout autre activité que la pratique du clairon. Le vice-président est Augustin Lafosse. Pierre Lafosse, son frère, est le chef de la clique. Tous deux sont les fils du maire inamovile d'Yainville. Le sous-chef est François Lebourg fils. Prunier jeune est le trésorier et A. Poullain membre. Grulay mis à part, tous ceux que nous venons de citer sont propriétaires. Ceux qui suivent sont cultivateurs : Th. Hulin, Vestu, A. Prévost, Duquesne, A. Senard, E. Lambert, Arestay, Hulay, Linant et V. Amand. 

Le 4 juin 1868 intervint l'arrêté suivant :

Le Sénateur-Préfet, vu le décret du 25 mars 1852, sur la proposition de M. le maire de Jumièges. Arrête : 

Art. 1er. M. Grulay instituteur à Jumièges, est autorisé à former en la dite commune, une société musicale sous la dénomination de Fanfare de Jumièges.

Art. 2. M. le maire de Jumièges est chargé de l'exécution du présent arrêté.

Rouen, le 4 juin 1868.

Pour le Sénateur-Préfet en tournée
Le conseiller de Préfecture délégué.

On perd très vite la trace de la société musicale de Jumièges. La guerre de 70 eut-elle raison de ses ardeurs musicales ? Et puis l'instituteur, Charles Gruley, finit par quitter la commune.

En juin la Cécilienne ramène un 4e prixu du cirque Saint-Sevère de Rouen :  "Dans le morceau choisi par cette Société, le Souvenir des Pyrénées, le commencement a manqué de justesse, et ce  défaut a persisté jusqu’à la fin. Le piston, lui-même, ne soigne pas assez ses notes élevées, et, peut-être, abuse-t-il des sons tremblés ; employé ainsi, ce procédé est un abus qui finit certainement par nuire à la justesse. Le mouvement vif de ce morceau a été exécuté de manière à fixer favorablement l’attention du jury ; cependant, nous devons dire qu’il a parfois manqué de netteté et d’aplomb. "

Juillet 1869, concours de Saint-Romain : " La Cécilienne de Duclair (19 exécutants). Directeur,
M. Huguerre. — Les attaques sont franches et les mouvements assez bien saisis, mais les cornets à pistons ne soignent pas assez leur style dans la manière de phraser."

1875. Selon l'annuaire des artistes, une société musicale est officiellement créée dans le chef-lieu de canton en 1875, pourtant, la Cécilienne existe déjà. Lors des législatives de 1877, la fanfare affirme son caractère apolitique. En témoigne cet article du Journal de Rouen daté  du 6 octobre :                                                                                         
Nous avons parlé hier d'une démonstration, organisée à Duclair, a propos d'une enquête sur l'emplacement de la gare de Yainville, et qui paraît destinée à servir plutôt que toute autre chose la candidature officielle de M. Delamare-Deboutteville.
A cette occasion plusieurs membres honoraires et actifs de la société musicale de Duclair, s'étant informés auprès du directeur de la part que cette société prendrait à la démonstration, celui-ci a adressé au maire de la localité une lettre où nous lisons ce qui suit :

"A tort ou à raison cette réunion de maires et d'adjoints, précédée et suivie de banquets officiels, passe pour avoir été organisée en vue des élections. Or, vous savez bien, monsieur le maire, puisque vous êtes son président, que la société musicale s'est formellement, interdit do s'occuper de politique. Et c'est pour que nul ne l'ignore que nous nous sommes abstenus lundi dernier d'aller saluer à son passage à Duclair, notre député sortant et membre honoraire M. Richard Waddington."

Nous félicitons la société musicale de Duclair de n'avoir pas voulu s'associer à une réclame électorale ; elle donne ainsi a qui de droit un bon exemple et une excellente leçon.

Octobre 1877. La Cécilienne se présente au concours de Louviers. Le compte-rendu de La France chorale :

Fanfare de Duclair. Le piston est trop haut. Un trombone a abusé des fausses notes. Les nuances ne sont aucunement observées. Les basses ne font pas leur rentrée. Il manque à cette Société les connaissances élémentaires de la musique. Les notes et leur durée. Qu’elle fasse du solfège cet hiver et l’année prochaine sa transformation sera complète.

Jugement sévère. Et pour cause, le concours se disputait dans la salle du tribunal. Dans un numéro suivant, la revue adoucit sa sentence :

Troisième division. — Deuxième section. —(Groupe C.).
Fanfare de Duclair, dir., M. Huguerre. — Bon ensemble, nuances bien rendues, accord pris avec soin. On sent que cette Société est entre les mains d’un artiste capable et consciencieux ; nos compliments à M Huguerre. Et maintenant le petit revers de la médaille : les mouvements sont généralement pris trop vifs, ce qui nuit à la clarté de certains traits; les basses se sont trouvées en avance à Yandantino à six huit, et elles ont conservé cette avance du rant toute la phrase, ce qui est une faute grave. La suite a très bien marché.

L'année suivante, Duclair obtient à Paris une 2e mention en lecture à vue dans sa catégorie de "fanfares sans saxophones".

Mais au concours de Montivilliers de 1882, la Cécilienne s'attire encore les critiques : "lit passablement..."

En décembre 1885, la Cécilienne fête sa sainte patronne :

La Société musicale de Duclair a célébré la Sainte-Cécile par l’exécution d’une messe en musique, où elle a fait entendre, sous l’excellnte direction de son chef, M. Huguerre, plusieurs morceaux de divers caractères, notamment une fantaisie sur les Dragons de Villars, dont l’interprétation a été fort goûtée. A la communion et à l’élévation, on a entendu un solo et un duo de violons exécuté, avec accompagnement d’orgue, par deux amateurs.
A l’issue de la messe un banquet réunissait dans les salons de l’Hôtel de la Poste les membres de la fanfare. Ce banquet, présidé par M. Cavoret, maire et président de la Société, ayant près de lui M. Guéroult, conseiller d’arrondissement, et plusieurs autres notabilités, était fort bien ordonné, grâce aux soins de M. Denise, qui d’ailleurs est coutumier du fait. M. le Maire a porté la santé du Président de la République. Ce toast a été salué par de chaleureux applaudissements. — M. Guéroult a porté un toast à la Fanfare de Duclair et à son dévoué chef, M. Huguerre. Ce dernier en a porté un aux membres honoraires en les remerciant de leur constant et généreux concours.
Selon l’usage une quête a été faite en faveur des vieillards de l’hospice de Duclair.
La réunion s’est gaiement terminée par l’exécution de plusieurs morceaux par la Société musicale, et, enfin, par des romances et des chansonnettes qui ont été vivement acclamées.

G. B.

En 1886, la "Musique de Duclair" reçut  100F du conseil général.

En mars 1888, au Paulu, plusieurs balles de déchets de cotons entreposées dans un hangar tombent sur M. Huguerre et son employé, le sieur Fondrin. Ce dernier à la jambe fracturée, Huguerre, lui, en est quitte pour quelques jours de repos. Sans la promptitude des secours, leurs cas était bien pire... Dès le mois suivant, Huguerre organise une de ces soirées mêlant chant et cuivres dont raffolent les Duclairois.

Fin 1892, la formation fut dissoute à la suite de la démission d'Huguerre. On en ignore la raison. Huguerre avait alors sa fabrique à Saint-Paër. Son fils Charles lui causa quelques soucis. Il fut condamné pour coups et blessures puis réformé de l'armée pour aliénation mentale. En 1900, il conservait cependant le statut d'industriel lorsqu'il découvrit dans l'Austreberthe le corps d'une septuagénaire suicidaire. D'industriel, il dégringola cependant au rang de journalier et fut condamné en 1913 pour braconnage à Villers-Ecalles. Son frère en revanche ne posa pas de problème. Mobilisé en 14, il fut renvoyé dans ses foyers un mois plus tard. Il est mort en 1950 à Rouen.

Huguerre ayant rendu sa baguette, Ménielle, le maire, demanda alors à Renault, commis-greffier de la Justice de Paix, de réorganiser la formation.

La fanfare de Duclair


1893. Le 15 mars 1893 la société fut officiellement reconstituée sous le nom de Fanfare de Duclair. Ses 18 exécutants évolueront dans la 3e division, 3e section. Elle aura des rendez-vous annuels : la fête nationale associée aux pompiers, les comices agricoles, la Sainte-Barbe, les fêtes patronales de Duclair et des environs comme la Saint-Laurent à Saint-Paul, la Sainte-Cécile en décembre. Il lui arrive aussi de réhausser le cérémonial de la remise des prix.


En 1900, la fanfare de Duclair anime aussi les Régates de Duclair. Car il en est ainsi tous les ans.Bref, dDirigée par Louis Pellerin, elle est omniprésente et fera longtemps danser tout le canton avec sa vingtaine d'exécutants. Clerc de notaire, assureur, Pellerin est natif de Pierrier-sur-Andelle. Figure du Dac, comptable à l'usine d'Yainville, son fils Marcel reprendra plus tard le flambeau.

1902. C'est la date de la création officielle de la "Fanfare de Duclair", selon l'Annaire des Artistes. Elle existe déjà cependant.

En août 1903, la fanfare donne un concert à la Saint-Roch au hameau de la Carrière, à Boscherville.

En 1905, la fanfare fait don d'un objet d'art à M. Lemire, président de la société de tir lorsque celui-ci reçoit la légion d'Honneur. Elle organise aussi un concert vocal et instrumental avec, annonce Le Travailleur Normand, "des artistes connus". Si connus qu'il n'en cite pas les noms. Ce type de soirées vocales et instrumentales sera proposé de loin en loin tant par la Fanfare que le Rappel. Nombre d'opérettes et revues seront créées dans le chef-lieu de canton.

La fanfare de Duclair en juillet 1906.


En 1906, on la voit engagée dans le concours de Vernon, catégorie des fanfares sans saxophone. Cette année-là, l'annuaire des artistes recense 166 sociétés musicales en Seine-Inférieure. On en trouve à Bacqueville, La Bouille, Barentin, Pavilly, Canteleu, Caudebec, Guerbaville, Villequier... Duclair compte une vingtaine de musiciens.

Juillet 1906 voici remonter une imposante flottille qui préfigure les Voiles de la Liberté. A Duclair, au milieu des détonations, la fanfare joue La Marseillaise mais aussi Ma Normandie, nos hymnes nationaux.
Août, ille participe au concours musical de Pavilly où elle remporte un premier prix et se fait ovationner lors d'un défilé en compagnie des sociétés de divisions inférieures primées.

Pour la fête du Vaurouy, hameau des Monts, la fanfare donne un concert dans la propriété de M. Panthou, en août 1908.

Citons, lors de la fête des pompiers de 1909, les instrumentistes distingués lors du concours de tir des sapeurs et musiciens. Grain, 1er prix devant quatre pompiers, Lecoq 6e, Carpentier 11e, Désiré Lebourg 14e, Fessard 19e, Pellerin 21e, Jules Masse 27e, Decharrois 28e, Mascrier 29e, Valler fils 30e, Lucien Varin 31e, Lecurier 32e. Voilà qui donne une idée de la composition de la formation. Le tout s'acheva au Chariot d'Or où la fanfare exécuta la Marseillaise.

Le 29 mai mai 1910 eut lieu un mémorable concours de pompes avec 34 sociétés et 800 hommes. Ouvrant le défilé inaugural, la fanfare sera bien sûr de la partie. Il y eut un morceau d'ensemble dirigé par Claret, le chef de la fanfare Badin. Mais c'est Duclair qui mit tout le monde au garde-à-vous avec la Marseillaise.
Toujours en 1910, le député Quillebeuf dépose à l'Assemblée quatre pétitions signées par les fanfares de Duclair, Clères et les deux formations pavillaises. On en ignore le contenu. En revanche, en mai 1913, la fanfare fut présente parmi au Houlme avec plusieurs sociétés musiciales pour l'inauguration du monument à la mémoire de Quillebeuf.

En juillet 1913, la fanfare suscita des hallucinations auditives chez des Anglais qui visitaient l'abbaye de Jumièges. On s'en amusera en lisent ce compte-rendu

En juin 1914, la fanfare obtient un premier prix au concours de Mantes, en Seine-et-Oise. Et puis ce fut la guerre...

La lyre des chantiers du Trait

1917. La guerre de 14 mobilise les musiciens de la fanfare de Duclair et fauchera neuf de ses exécutants. Notammement Edouard Decharvois qui conservait dans ses bagages une chanson  sur Duclair :

Malgré la mobilisation, une nouvelle formation parvient à voir le jour aux chantiers du Trait menée par M. Becques.
A l'Armistice, la vie reprend avec ses rendez-vous d'antant. Présidée par Dupont, on retrouve la fanfare de Duclair dans nombre de cérémonies patriotiques où elle est en concurrence avec  la Lyre que l'on verra chaque année jouer pour saint Eloi, le patron des métallurgistes.

La lyre des chantiers du Trait est née à en 1917. Elle eut successivement pour chefs MM. Becques, Haine, Marson, Coisy et Couvez père et fils. Elle a fusionné en 1953 avec la clique des pompiers.

L'avènement de la culture populaire

Le 13 octobre 1921, la fanfare donne un concert au profit du monument aux morts. Il est organisé par l'association des anciens combattants. Ce type de manifestations se multiplie par tout dans le canton, comme à Yainville, Varengeville... La formation dirigée par Pellerin va atteindre la quarantaine d'exécutants.

C'est au Trait que, le 3 juin 1923, aura lieu un gigantesque rassemblement de fanfares réunissant 1.200 musiciens et 20.000 spectateurs venus de tout le département. La plus grosse fête de l'après-guerre dans le canton. C'est du reste en 1923 que la Lyre reçut sa superbe bannière.  Et cette période marque l'avènement de la culture populaire. On chante au club artistique du Trait ou va bientôt s'épanouir un orchestre féminin de mandolines, la Estudiantina. On note aussi l'existence d'une Symphonie des chantiers. Le kiosque à musique est le cadre de fréquents concerts. A Duclair, rue des Moulins, existe un club de danse malgré les foudres du clergé...

A la Sainte-Cécile de 1923, la fanfare rendit hommage à ses neuf victimes de la Grande guerre. Elle joura ce jour-là "Cortège triomphal" et "Saverne" devant les photos de ses martyrs.

La Lyre en 1931. Quelques noms : MM Martel, Lucien Couvez fils, Guérillon, Lotte, Brument, Mardoc, Billoir, Daens, Morel, Schamme, Vlc, Adrien Canu, Balcène, Georges Couvez, Achille Dupuich au centre, Malheuvre, Lucien Couvez père, Pros, Messue, Prestout, Goret, Langlois, Blaise Couvez, Maréchal, Rasez, Boulais...


Le 30 août 31, on peut lire dans le Journal du Trait après un concert donné au kiosque : "Sous la baguette habile de M. Couvez père, nos musiciens se surpassèrent avec la Voix des cloches de Luigini Parès... Nos solistes, Blaise et Georges Couvez, Henri Schamme, M. Morel, Malheuvre méritent nos sincères salutations..."

De 1932 à la guerre, Lucien Couvez conservera la direction de la Lyre. A la Libération, son fils Georges la remettra sur pied.

Et la clique devint le Rappel


1924. Le Trait comme Duclair mais aussi Boscherville ou encore Varengeville ont compté aussi leur clique de sapeurs pompiers.
Le 8 mars 1924, sous l'impulsion de Henry Soudais, son directeur, celle du chef-lieu devient le Rappel de Duclair. La création de cette société de musique a pour but d'apporter une animation à la ville et "l'instruction musicale des jeunes gens avant le service militaire". Cette nouvelle formation jouera de concert avec son homologue et on les retrouve toutes deux aux régates et autres lieux. Maurice Savalle en est le Président fondateur, Georges Dubosc le Vice-président, Eugène Mascrier trésorier, H. Dubosc secrétaire, Henri Souday directeur, A. Lorillon, Jean Allais, et Amand Ponty membres administrateurs.

En 1910, la clique des pompiers de Duclair, ancêtre du Rappel ci-dessous...

Battons le rappel...


Le 8 mars 1924, le Rappel de Duclair ne comprenait quelques tambours et clairons autour de la grosse caisse. C'était une clique, comme on disait alors, avec l'idée de former quelques jeunes. Le fondateur, M. Vacher, avait autour de lui des passionnés comme G. et H. Mascrier, H. Allais, G. et H. Souday, L. Genet, E. Hauchecorne, A. Ouin, A. Petit, A. Ponty...

Le 6 juillet 1924, lors d'un concours agricole, le Rappel reçut son drapeau confectionné par de jeunes Duclairoises. La jeune société était alors présidée par M. Savalle tandis que M. Dubosc en était le vice-président. Place de l'hôtel-de-ville, M. De Heyn, adjoint au maire, souhaita longue vie au Rappel. Après quoi, la formation défila en compagnie de la fanfare jusqu'au champ de foire.
Dès lors, le calendrier du Rappel ressemble à celui de sa devancière. Elle aussi organisera des soirées mêlant musique instrumentale et chant lyrique.

En 1825 ont lieu de grandes fêtes au Trait. L'occasion d'inaugurer le kiosque à musique. La fanfare de Duclair et sans doute le Rappel sont présents aux côtés de la Lyre mais aussi des "tambours et clairons du Trait".

En mai 1928, le Rappel est au festival de musique à Barentin, à la kermesse du manoir d'Ambourville en août suivant où un jeune colon offre une gerbe au chef, Le Rappel sera chaque année au rendez-vous du 14 Juillet, de la rentrée des pompes...

En juillet 1929, sous la présidence de M. Vacher, Henry Souday démissionne. Il est remplacé par Henri Allais, déjà chef instructeur.

En octobre 1934, c'est M. Tartarin, le président, lorsque le Rappel participe à la rentrée des pompes suivie d'un banquet à l'Aigle d'Or. Durant toutes ces années la formation cohabite parfaitement avec la fanfare de Duclair.


En juillet 1935, le Rappel se distingue au festival de musique de la fête des fleurs de Pavilly. A Duclair, on le retrouve sur la Côte des Moulins à la fête du Dac en mai 36 puis à la fête de la Jeunesse en juin. Régulièrement, la Saint-Laurent de Saint-Paul, est sur son agenda.

Le 21 juin 1936 a lieu la IXe fête du plein air à Duclair. C'est une fête de la Jeunesse dans l'esprit du Front populaire. Les deux fanfares locales et celle du Trait sont associées aux Volontaires d'Elbeuf. 

Janvier 37 : nouvelle soirée proposée par la fanfare. On y entend notamment une opérette composée par Henri Allais et Raoul Praxy, "Enlevez-moi".
En avril 1937, M. Hinfray est le président du Rappel lorsque l'on honore en grande pompe Mme Godey, la centenaire de Duclair. Les 3 et 4 juillet, à l'occasion du congrès régional de l'UNC, il y eut un festival de musique à Duclair auquel le Rappel prit tout naturellement sa part.
Février 38, la fanfare donne son deuxième bal. Toutes ces manifestations sont l'occasion de quêtes par les notables.
A la grande fête des fleurs de juin 38, nos deux formation ont de quoi prendre de la graine. Les invités-vedettes sont les tambours et clairons de la Garde républicaine.
En août, la fanfare se rend en excursion à Deauville.
4 décembre 38 : le Rappel organise à son tour une soirée théâtrale à l'hôtel de ville avec le concours de la Cigale rouennaise avec notamment une opérette, Chasse réservée, au programme.
Juin 39, grande fête normande à Duclair. La fanfare et le Rappel encadrent le char du comité où l'on voit M. Petit déguster une bollée de cidre sous un pommier en fleurs et entouré de jeunes Normands. Et c'est à nouveau la guerre...

1945. Naissance de la clique des sapeurs pompiers du Trait, composée uniquement de tambours et clairons sous la baguette de Joseph Vlc, un ouvrier venu de Prague.

Dans les années 50, le Rappel atteint les 52 exécutants. Paul Herment prenait alors ses fonctions de président avec Jacques Mas pour directeur. Les sorties se multiplient. On se souvient qu'à Saint-Paul, Maurice Thilliez avait appris à quelques musiciens les sonneries des veneurs. On avait alors équipé le Rappel de trompettes d'harmonie, de trombones à coulisse, de trompettes de cavalerie et de cors de chasse.


Après guerre, le Rappel retrouve un calendrier chargé : la Saint-Gilles au Paulu, la Saint-Pierre à Jumièges, la Saint-Laurent, la fête des Monts... En mai 1952, sous la baguette de son jeune chef revenu du régiment, le Rappel est de la fête de la Victoire, devant le monument aux morts, où MM. Louet et Adrien Herment sont décorés. Mais les officiers des sapeurs-pompiers boudent la cérémonie. Motif : les uniformes de leurs hommes datent de 1900 ! Pourtant, la municipalité reçoit des subventions pour renouveler l'habillement.

1953. A la demande de Raymond Brétéché, maire du Trait, la Lyre des chantiers du Trait fusionne avec la clique des sapeurs pompiers sous la direction de Georges Couvez. Son nouveau nom : Musique municipale.

Paul Herment fut président du Rappel de Duclair de 1954 à 1994, année de sa disparition. Le 11 mars 1984, il avait été élu aussi président des fanfares de Haute-Normandie. Ce fut pour lui un septennat. 
En 1985, il réalisé son rêve : exporter le Rappel à l'étranger. La formation alla jouer  à Linderte, en Allemagne.
Marcel Herment mourut brutalement à 66 ans le 3 avril 1994. Les 21 et 22 mai suivants, les 70 ans du Rappel lui furent dédiés. Le samedi, la musique départementale des sapeurs-pompiers donna une aubade sous la baguette d'une jeune femme : Anita Riou. Il y eut un discours de Dominique Ponty, le directeur du Rappel, une remise de plaque commémorative à Monique Herment, la veuve du président. On honora Claude Ponty et Daniel Bordet pour cinquante ans de musique. Dominique Ponty reçut quant à lui la Croix du Mérite musical, Anita Riou la coupelle d'argent de la ville de Duclair...

Quand l'une meurt, l'autre naît...


1970. Création de l'école intercommunale de musique et de danse. Elle succède aux cours dispensés depuis des années par le conservatoire de Rouen et dont j'ai fréquenté dans les années 60 la classe de violoncelle dirigée par Mlle Sainton. Cette école est dirigée par Jacques Berrut. Jacques Couvez lui succède six ans après la création. Habitant Duclair, originaire du Trait où son père a longtemps dirigé l'harmonie municipale, il assure à son tour cette fonction.


1972.
Après une pause musicale, la fanfare des sapeurs-pompiers du Trait s'est reformée en 1972.
En 2014, elle comptera une quarantaine de musiciens dirigés par le capitaine Aloïs Vlc. Celui-ci cèdera la direction de la formation en 2017 à Guillaume Foucault, son adjoint.  Rénaldo Jean, Isabelle Jean et Jean-Marie Coguyec ont reçu la médaille vermeil pour 15 années ; Ghislaine Foucault et Bénédicte Foucault, la médaille d’or pour 25 années. Cette dernière a également été promue Tambour Major, responsable de l’ensemble des percussions. Valérie Lebrun, professeur au conservatoire du Val de Seine, signe des compositions pour la formation.

1984. Dirigée par Louis Pellerin puis son fils Marcel, la vieille fanfare de Duclair, héritière de la Céciliène, est morte de sa belle mort le 12 juillet 1984 après plus d'un siècle de pratique musicale.

1986. Sainte-Marguerite-sur-Duclair aura aussi sa fanfare. Le 2 septembre 1986, l'Avenir de Sainte-Marguerite s'érige en association sous la présidence de Rémy Parquet. L'animation des fêtes foraines est sa profession de foi. En 1989, l'Avenir compte 32 sorties dont une à Paris. La fanfare est alors dirigée par Denis Mustel. 

A la Sainte-Cécile de 89, on récompense Jérôme Elie, Stéphanie Dupuis, Max et Henri Mairai, Jérémy Coguyec, Stéphanie Agasse, Sandrine Darieux, Infrid et Yannick Wannier, Laurent Masurier et Jérôme Bertin. Médailles d'encouragement : Benoît Simon, Sonia Mustel, Pascal Ponty, Cédric et Sandra Million, Stéphanie Elie, Jérôme Vigé, Tony Mustel, Céline Agasse, Nadège Lydie, Philippe et Jean-Claude Simon, Sébastien et Evelyne Ponty, Christelle Parquet, Corinne Decaux, Patricia Baronchelli, Laurent Shevrer, Alain Dupuis, Gérard Dumouchel, Gerogette et René Langevin. Médailles de bronze : Jean-Louis Parquet pour dix ans de musique, Vincent, Franck et Patrick Vincent.

1989. La place du marché le jour des 65 ans du Rappel de Duclair...



Aujourd'hui...


Aujourd'hui, la salle où répète deux fois par semaine le Rappel de Duclair porte le nom de Paul Herment. 
 La batterie-fanfard aura eu pour chefs successifs Henri Soudais, Henri Allais, Marius Dutas, Eugène Hauchecorne, Jacques Mas, Jacques Petit, André Genet, Philippe Ponty, Dominique Ponty. C'est une formation toujours bien vivante avec une trentaine de musiciens. 

En 2008, l'Office de tourisme de Duclair accueillit une exposition de photos Le président Louis Ponty, et le directeur Philippe Ponty, avaient mené des recherches minutieuses. L'occasion de revoir des figures emblématiques en tenue d'époque et de revivre les temps forts de l'histoire duclairoise. La collection de Mme Petit était particulièrement riche en images des années 55 à 60. En 2008, le Rappel comptait 27 musiciens, le plus jeune ayant 4 ans et le vétéran 71.



Un demi-siècle au sein du rappel ! En 2014, Rémy Ponty, le président, était aussi délégué pour la Haute-Normandie de l'Union des fanfares de France. Béatrice Herment était la vice-présidente et Evelyne Ponty la secrétaire. Bref, une histoire de famille. 11 ans, clairon, Caroline Ponty était la benjamine.

En 2022, le Rappel fut endeuillé par la disparition de Dominique Ponty, le chef d'orchestre. En novembre, on fêta la Sainte-Cécile, tant au monument aux morts qu'au Clos Bolard pour un concert. Ce fut l'occasion d'honorer quelques-uns des musiciens : Victor Ponty (argent), Micheline Lefrançois (vermeil) et Béatrice Herment (vermeil) pour 13 ans de présence, et Valérie Agasse (croix du mérite musical) pour 38 ans de musique.

Puis vint le centenaire de la formation en mai 2024, événement auquel Victor Ponty eut la gentillesse de nous associer.

Laurent QUEVILLY.



Vous avez des documents, des anecdotes sur les fanfares du canton ? N'hésitez pas à nous en faire part...

Fermez le ban !


Sources

Dossier 4 T 59 numérisé aux Archives départementales de la Seine-Maritime par Josiane Marchand et Jean-Yves Marchand. Rédaction : Laurent Quevilly.

Journal de Rouen.

Paris-Normandie, 1989.

Gilbert Fromager, Le canton de Duclair.

L'Avenir normand.

Victor Ponty, centenaire du Rappel, 2024.

NDLR : un incident technique a dispersé nos photos. Nous comptons sur votre aide pour les restituer par dates et formations.