Durant 120 ans, la commune de Jumièges fut dotée d'une compagnie de sapeurs pompiers. En voici l'histoire mouvementée...
A Jumièges, comme ailleurs, de nombreux incendies ont marqué l'histoire du village. Nous n'évoquerons pas ici ceux dont l'abbaye fut l'objet. Mais vers, vers 1438, on signale à titre d'exemple que des malfaiteurs mirent le feu à la forêt de Jumièges. 48 arpents furent détruits.
L'abbé pyromaneDans les années 1720, l'abbé de Saint-Simon passe pour avoir faite détruire par le feu plusieurs maisons dont il convoitait le terrain afin d'agrandir son domaine propre. On se souvenait d'un pauvre hère qui, rentré tard le soir chez lui, erra toute la nuit à la recherche de sa chaumière, refusant l'idée qu'elle ait disparu.
Le
tyrannique abbé, craignant une révolte des
Jumiégois, finit par lui accorder une maison en bord de
Seine où vécurent longtemps ses descendants.
Drame
à Yainville... Le 23 mars 1717, à 9h du soir, une maison prend feu à Yainville. On retrouvera les restes calcinés de Barbe Vivien, veuve Dubois, 60 ans, Antoine Marette, 16 ans, Jeanne, 8 ans, Jean, 6 ans, Magdeleine, 3 ans. Ils furent inhumés le 25 mars. |
Sous la Révolution, le presbytère de Jumièges fut la proie des flammes. Le 5 août 1808, la vingtaine de chaumières du bourg furent détruites. Hauriolle, grand dénonciateur sous la Terreur, pénétra dans une cave. On l'en retira asphyxié. Les pierres de l'abbaye servirent à la reconstruction. On interdit l’usage du chaume. Ce qui ne fut pas strictement appliqué.... |
C'est
une circulaire du 6 février 1815 qui organisa le service
incendie en France. Les préfets, qui nommaient officiers et
sous-officiers, furent chargés d'établir la liste
des communes où ce service était
nécessaire. Les compagnies dépendaient de
l'autorité municipale.
De 1831, à 1871, les sapeurs pompiers seront
intégrés à la Garde
nationale...
Le
15 juin 1853, sept mystérieux incendies se
déclarent à Jumièges. Dès
le lendemain, le capitaine commandant provisoirement la compagnie de la
Seine-Inférieure alerte le préfet :
« J'ai l'honneur de vous informer qu'hier, 15 juin,
un incendie dont la cause est demeurée inconnue, s'est
déclaré vers 5 h du matin dans la commune de
Jumièges et qu'un bâtiment appartenant au sieur
Casimir Dossier, cultivateur au dit lieu, a été
la proie des flammes.
Plus tard, dans la même journée, la brigade de
Duclair venait de prendre des renseignements sur cet incendie, elle fut
prévenue de nouveau qu'une grange attenante au
bâtiment incendié qui avait
été préservé le matin
était en feu. A son arrivée sur les lieux, la
grange était détruite. La perte
évaluée de ces deux bâtiments est
environ de 2020 francs (assuré).
Dans la soirée du même jour et dans la
même commune, le feu a éclaté de
nouveau et a réduit en cendres cinq bâtiments. Les
détails manquent sur ces nouveaux incendies.
La justice est sur les lieux et procède à une
enquête. La clameur publique attribue ces sinistres
à la malveillance.»
L'affaire remonte jusqu'au ministre de la police
générale. De Rouen, le 18 juin, le 3e bureau de
police évoque le dernier incendie intervenu dans la
soirée et qui a détruit des bâtiments
ainsi que le mobilier qu'ils renfermaient. Les
dégâts sont estimés à 40 000
F. « Les bâtiments étaient
assurés à la compagnie La Normandie. On ignore si
le mobilier était également assuré. Ce
triple sinistre est attribué à la malveillance.
La Justice informe.
C'est
à Michel Lepicard, maire de Jumièges de 1852
à 1856, que l'on doit la création du corps. Le 20
juin 1853, il demande au préfet l'acquisition d'une pompe
à incendie.
« Vous avez probablement appris le triste et
douloureux événement qui vient de frapper la
commune de Jumièges. Trois incendies se sont
succédé en moins de trente six heures dans la
même propriété.
Dans cette triste situation, les habitants réclament une
pompe dont la commune est dépourvue et je croirais manquer
à mon devoir si je ne m'empressais de provoquer le vote du
conseil municipal à ce sujet. Je viens donc vous prier,
Monsieur le Préfet, de bien vouloir m'autoriser à
convoquer le conseil municipal pour délibérer :
1) Sur l'acquisition d'une pompe à
incendie. 2) Sur les bases à adopter pour la formation d'un règlement interdisant les couvertures en paille à moins de 200 mètres de l'enceinte du bourg. Le corps est donc créé le 12 juillet 1853 avec un effectif de 26 hommes. Valentin Poisson en est le chef de corps et sera nommé sous lieutenant le 11 mars 1854. |
La liste des chefs de
corps
Valentin POISSON, nommé sous lieutenant le 11 mars 1854. Hippolyte SENARD, nommé le 4 avril 1860, révoqué par décret en août 1882 Eugène YBERT, nommé le 29 septembre 1882 Eléonor LAMBERT, nommé en 1888 Léon Lambert, nommé en 1921. René Deuil, nommé le 1er avril 1935. Claude Deuil, nommé en 1954 jusqu'à la dissolution, le 1er mars 1972. |
Le 26 mars 1855, le feu se déclare chez les lieutenant Paris, chef des douaniers. Pompiers et habitants font face et, avec un vent favoroable, limitent la propagation. Mais la maison et le mobilier sont détuits. De Duclair, le commissaire de police et les gendarment viennent sur place. Et arrêtent Mlle Vauquelin, souffrant d'aliénation mentale...
Chahuté, le maire démissionneOn doit à Michel Picard le corps des pompiers, la mairie, l'école. Il avança de l'argent à la commune mais, malmené par ses concitoyens, fut contraint à la démission...
L'an
mil huit cent cinquante six, le jeudi quinze mai, à 9h du
matin, les membres composant la commission municipale
instituée par arrêté
préfectoral du 24 avril dernier, dûment
convoqués, se sont réunis au local de la mairie.
Monsieur Grandchamp, maire, présidant l'assemblée
en ouvrant la séance prend la parole et dit.
« Messieurs, Monsieur le préfet vient de
m'élever aux fonctions honorables de maire de votre commune
en remplacement de M. Lepicard, démissionnaire.
Je regrette vivement d'avoir vu cet honorable magistrat dans
l'obligation de résigner ses fonctions par suite des
entraves que lui suscitaient chaque jour des hommes excités
par de mauvais instincts, par de mauvaises passions.
Je le regrette d'autant plus qu'il a plus fait, dans sa trop courte
administration, que tous ceux qui l'ont
précédé. Il a doté la
commune d'un mairie et d'une école. La commune
était pauvre, dénuée de toute
ressource et sans les fonds qu'il a avancés à des
conditions extrêmement douces, elle en serait encore
privée.
Vous n'aviez pas de pompe à incendie, chose si utile dans vos campagnes où la plupart des bâtiments sont couverts de chaume, il vous en a procuré une et a organisé une compagnie de pompiers qui, déjà par son activité et son zèle, mérite nos éloges. Enfin, il a rendu beaucoup d'autres services dont l'énumération serait ici trop longue. C'est pourquoi je lui vote des remerciements et lui manifeste ici tout mes regrets de le voir se retirer si vite d'une administration où il a laissé des souvenirs aussi mémorables.
Plusieurs
membres de l'ancienne administration font partie aujourd'hui de la
nouvelle commission et ont vu, ils ont été
témoins, des scènes bruyantes et scandaleuses qui
avaient lieu dans presque toutes les séances. Plusieurs
d'entre vous qui étaient restés purs et
honnêtes en étaient indignés, mais
comment y remédier ! Il fallait suspendre tous les membres
de ce conseil, c'est le sage parti que l'honorable magistrat qui
administre notre département avec autant de zèle
que d'habileté a dû prendre.
Achille Grandchamp, oncle de l'auteur d'Arsène Lupin habite "le château" de Jumièges., Le 12 mars 1860, il demande un traitement de faveur pour les sapeurs. Poisson vient de démissionner.
La propriété Grandchamp
« La plupart des hommes de cette compagnie sont recrutés parmi les artisans, ouvriers, maçons, charpentiers, couvreurs et comme plus aptes à remplir leurs fonctions, mais c'est assez vrai de dire que ces honnêtes citoyens ne sont pas riches et cependant souvent appelés à la manœuvre de la pompe et pendant un temps qui leur est précieux. D'un autre côté, l'administration à tout intérêt à conserver cette compagnie qui d'un moment à l'autre peut être appelée à rendre de si grands services. Que faire alors ? Accorder une gratification à chacun des ces hommes, cela deviendrait trop onéreux pour la commune. J'ai donc pensé, en attendant qu'un loi vienne fixer le sort de ces honnêtes citoyens, qu'il y a lieu de les exonérer de la prestation (en nature) et j'ai été convaincu que cette légère indemnité les satisferait. Il est à observer que cette réduction sur le contingent à fournir pour la réparation des chemins serait insignifiante, surtout actuellement où la journée se trouvant considérablement augmentée, doit produire un quart de prestations, au moins, plus que les années précédentes.
Si
donc, cette proposition est susceptible d'être
accordée, je vous serai infiniment obligé,
Monsieur le sénateur préfet, de bien vouloir m'en
informer. Dans le cas contraire, je vous prierai de m'indiquer
quelqu'autre moyen pour attacher ces hommes à leur service
et réparer, en partie du moins, la perte de temps qu'ils
éprouvent, sinon l'administration s'exposerait à
voir cette petite compagnie dissoute prochainement par la
démission de chacun de ses membres.
Le
préfet répond à Grandchamp le 13 mars
1860. « Personne, plus que moi, Monsieur le maire,
ne rend justice aux excellentes intentions qui vous portent
à vouloir accorder un léger
dédommagement aux braves artisans qui se consacrent avec le
plus louable désintéressement au service de
sapeur pompier. Malheureusement, la loi ne permet pas cette
exonération, je ne verrais d'autre moyen possible que celui
d'une allocation spéciale votée par le conseil
municipal."
Le 4 avril 1860, Hippolyte
Senard remplace Poisson et est
nommé sous lieutenant.
Incendie criminel chez Desjardins
4 mars 1861 : incendie
chez Pierre Desjardins,
cultivateur au Passage. Un corps de bâtiment de 24 m de long,
surmonté d'un étage couvert en tuiles et en ardoises est
en feu Foin, paille, blé et une partie du mobilier sont
détruits. Bilan : 7.000 F de dégâts non
assurés. C'est un incendie criminel. Il a été
commis par Laurence Pernon, une gamine 12 ans de l'assistance
accueillie par Desjardins. Les gendarmes de Duclair la conduisent
devant la Justice de Rouen. Et ce furent les Assises. A charge. Un an
plus tôt, elle avait été surprise volant une
pièce de 5F. Lors de l'incendie, elle commença par
affirmer avoir vu un barbu prendre la fuite. Puis elle avoua
après 24 heures de réponses évasives. Motif ? Mme
Desjardins, Alphonsine Cabut, lui avait ôté un tablier.
Mais au procès, elle parlera de mauvais traitements. Le
susbstitut Ferant accablera l'accusée, soulignant son
intelligence. En revanche, Vermont fils plaidera l'inconscience de
cette jeune illettrée. Elle sera effectivement acquittée
et consuite en maison de correction jusqu'à ses 18 ans.
Sacré feu d'artifice
C'est la Saint-Pierre, ce 5 juillet 1863. Il
est dix heures et demie du soir et l'on vient de tirer le feu
d'artifice. Après le bouquet, des cris se font entendre.
Propriétaire de l'abbaye, Lepel-Cointet, maire, Maître
Bicheray, son adjoint, bref, tout le monde accourt, y compris le
commissaire de police de Duclair, Canivet, ainsi que la brigade de
gendarmerie, présente pour la fête. Le feu a pris dans un
pressoir long de 60 m, couvert en chaume, occupé par Vestu et
appartenant à Poullain, dit Grandchamp. L'immeuble est
assuré chez Lanne ainsi que les objets qui s'y trouvaient.
Le 5 août, ce sont deux feux qui se déclarent dans la région. Le premier vers 15h30 au Mesnil chez Adolphé Crépin, brocanteur, dans sa maison appartenant à Charles Guillemain, de Jumièges. Le second au Trait vers huit heures du soir chez François Mauger, locataire de la veuve Eliot. Sous la direction de Doucet, maire, les propriétés voisines sont préservées.
La fronde des pompiersA partir de 1875, on supprima le service militaire chez les pompiers. Mais un décret du 29 décembre 1875 ordonne que les sapeurs pompiers signent un engagement de cinq ans dans un premier temps. A Jumièges, ils refusent !
L'an mil huit cent soixante seize, le septième jour du mois d'août, à neuf heures du matin, le conseil municipal de la commune de Jumièges, convoqué en session ordinaire, s'est réuni dans la salle de la mairie, lieu ordinaire de ses délibérations. Étaient présents : Monsieur Chrétien Eugène, présidant la réunion, M. Poisson Valentin, adjoint et MM Bicheray, Cabut, Desjardins, Boutard, Philippe, Lafosse, Vauquelin, Gruley et Chandchamp. Absent : M. Délogé.
La
séance étant ouverte, M. Bicheray est
élu secrétaire et prend place au bureau. Le maire
donne connaissance à l'assemblée des dispositions
du décret du 29 décembre 1875 sur l'organisation
des corps des sapeurs pompiers, il fait observer qu'aux termes des
dispositions transitoires de ce décret, les corps
actuellement existant doivent être
réorganisés dans le délai d'un an et
que tout sapeur pompier doit prendre, au moment de son admission,
l'engagement par écrit de servir pensant cinq ans et se
soumettre à toutes les obligations du service. Il informe le
conseil que le décret précité a
été communiqué à la mairie
aux sapeurs pompiers, que tous ont répondu ne vouloir
souscrire aucun engagement, tous ont déclaré et
redit être disposés à continuer leur
service si l'administration supérieure consentait
à les maintenir dans leur position actuelle. A cet cette
fin, il
invite le conseil de bien vouloir faire connaître par une
délibération l'avis qu'il désire
émettre à ce sujet.
Le conseil municipal, considérant que l'organisation
régulière et permanence d'un service de secours
en cas d'incendie répond nécessairement aux
besoins et aux vœux du pays, considérant que les
sapeurs pompiers, malgré le matériel suffisant
que possède la commune pour leur service, refusent de
souscrire l'engagement prévu par l'article 11 du
décret sus visé demandent à
être maintenus dans leur situation actuelle,
Regrette les résolutions prises par le corps des sapeurs
pompiers, prie M. le préfet dans
l'intérêt de la sécurité
publique, de vouloir bien faire une concession en leur faveur et leur
accorder la demande qu'ils sollicitent....
Le 20 août 1876, dans le cadre de la
réorganisation du corps, trois hommes sont
désignés pour procéder aux admissions
: Hippolyte Senard, sous-lieutenant, Sever Mazot, sergent et Fulgence
Minotte, caporal. C'est Poisson, adjoint qui signe le tableau.
Le 26 août 1876, le conseil se réunit à
nouveau. Boutard et Philippe sont absents. Bicheray est encore
secrétaire.
« La séance étant ouverte, le
maire donne lecture de la lettre préfectorale sus
visée et impose que les dispositions du décret du
29 décembre 1875 relatif au service et à la
réorganisation des corps des sapeurs pompiers ont
été mal comprises et
interprétées, que le conseil municipal n'a
nullement à intervenir dans le choix des hommes qui doivent
en faire partie, que les admissions doivent être
prononcées par une commission nommée à
cet effet par lui et le conseil municipal et que le vote du conseil
doit porter seulement sur l'utilité de la
réorganisation du corps de sapeurs pompiers existant dans la
commune et sur l'engagement de cinq ans prescrit par l'article 6 du
décret précité en ce qui concerne les
dépenses que l'organisation d'un corps de sapeurs pompiers
dans la commune est d'une utilité incontestable en cas
d'incendie.
Considérant que la commune possède une pompe
à incendie avec un matériel de secours suffisant
ainsi qu'une grande partie des habillements et autres objets
nécessaires pour le service, délibère
qu'il y a lieu de réorganiser la subdivision de sapeurs
pompiers de la commune de Jumièges et d'en fixer les cadres
à 25 hommes dont un sous-lieutenant, un sergent deux
caporaux et un tambour.
Oblige la commune à prélever sur ses revenus
ordinaires pendant cinq ans, à partir de 1877,
indépendamment des crédits ouvert au budget pour
cet objet une somme annuelle de 100F pour subvenir aux
dépenses énumérées dans
l'article 29 du décret précité,
notamment en ce qui concerne les secours ou pensions à
accorder aux sapeurs pompiers victimes de leur dévouement.
Accorde aux sapeurs pompiers l'exonération de la prestation
en nature à laquelle ils sont soumis pour leur propre
personne relativement aux chemins vicinaux et nomme MM Bicheray Armand
et Poisson Valentin, conseillers municipaux, pour faire partie de la
commission chargée d'examiner les demandes d'admission et
d'arrêter définitivement les contrôles
de la subdivision.
Nouvelle réunion en mairie le 1er octobre 1876. On se
prononce sur les admissions des hommes qui devront bien s'engager pour
cinq ans. Les sapeurs, convoqués par leur chef, sont
présents à la réunion. On lit le
décret de 1875. «La commission s'est
occupée de l'admission des hommes devant former le nouveau
corps, ayant trouvé après examen que tous les
pompiers en exercice remplissaient les conditions
réglementaires, elle les a invité, chacun en
particulier, a bien vouloir souscrire l'engagement... Tous ont
refusé, seulement, ils ont déclaré
qu'ils étaient disposés à continuer
leur service si l'administration supérieure consentait
à les maintenir dans leur position actuelle,
c'est-à-dire sans engagement, autrement, ils
préféraient se retirer. La commission a
employé tous les moyens possibles pour les faire revenir sur
leur détermination, elle a appelé leur attention
sur l'utilité de leur institution et sur les services
qu'elle peut rendre au pays dans le cas d'incendie; elle s'est
efforcée de leur faire comprendre qu'il serait
désirable pour la sécurité de la
commune que leur compagnie continuât de subsister.
Malgré ces exhortations, rien n'a pu ébranler
leur résolution. En conséquence, la commission a
dressé le présent procès-verbal pour
être transmis à qui de droit et recevoir telle
suite qu'il appartient.... »
Le
1er octobre 1876, le maire, Chrétien, certifie exact la
composition de la subdivision de Jumièges. Elle
s'établit comme suit :
Hippolyte Senard, entrepreneur, sous-lieutenant; Jacques
Herpin, rentier, porte-drapeau ; Sever Mazot, cultivateur, sergent ;
Fulgence Minotte, journalier, sergent ; Victor Ponty, cultivateur,
caporal, Alfred Herpin, cultivateur, caporal ;
Frédéric Ybert, cultivateur, charron, caporal ;
Louis Duparc, cultivateur, caporal ; Delphin Cabut, cultivateur,
pompier ; Désiré Lesueur, cafetier, pompier ;
Édouard Lefebvre, cultivateur, pompier ; Hippolyte Douville,
journalier, pompier ; Adolphe Simion, cultivateur, pompier, Casimir
Dossier, cultivateur, pompier ; Eléonor Guéroult,
charpentier, pompier ; Stanislas Dossier, cultivateur, pompier ;
Cléophas Mazot, cultivateur, pompier ; Henri Sarcelet,
journalier, pompier ; Deshays Tranquille, cultivateur, pompier ;
Alexandre Decaux fils, cultivateur, pompier ; Alphonse Simion,
cultivateur, pompier ; Médéric Salmon, serrurier,
tambour.
L'administration semble s'être inclinée et
Hippolyte Senard est reconduit chef de corps le 29 novembre 1876.
12 mars 1879, c'est la mise en place d'un règlement.
Article 1er. Il est réorganisé dans la commune de Jumièges une subdivision de compagnie de sapeurs pompiers pour le service des secours en cas d'incendie, cette subdivision pourra être exceptionnellement appelée en cas de sinistre autre que l'incendie à concourir à un service d'ordre ou de sauvetage et fournir, avec l'assentiment de l'autorité militaire, des escortes dans les cérémonies publiques.
Article 2. La subdivision de compagnie dont il s'agit se composera de 26 hommes, savoir un sous-lieutenant, deux sergents, quatre caporaux, un tambour et 18 sapeurs pompiers.
Article 3. Elle se recrutera au moyen d'engagements volontaires parmi les hommes qui auront satisfait à la loi du recrutement ou qui n'appartiendront qu'à la réserve ou à l'armée territoriale, dans ce cas, les hommes resteront soumis à toutes les obligations que leur impose la loi militaire.
Article 4. Les sapeurs pompiers seront choisis de préférence parmi les anciens officiers, sous officiers et soldats du génie et d'artillerie et parmi les habitants de la commune exerçant les professions de maçons, charpentiers, couvreurs, menuisiers, charrons, serruriers et autres professions relatives à la construction du bâtiment.
Article 5. Seront exclus de cette compagnie les individus privés en tout ou en partie de leurs droits civils.
Article 6. L'admission des candidats sera prononcée par une commission composée du maire ou de son adjoint, président, de deux membres du conseil municipal désignés à cet effet par le conseil et de trois délégués choisis par le préfet.
Article 7. Nul ne sera admis s'il ne prend l'engagement par écrit de faire partie de la compagnie pendant cinq ans et s'il ne se soumet à toutes les obligations du présent règlement.
Article 8. Tout sapeur pompier qui se retirera avant l'expiration de son engagement ou qui sera rayé des contrôles perdra ses droits aux avantages pécuniaires ou autres auxquels ils pourrait prétendre.
Article 9. Le conseil d'administration se composera pour la subdivision 1° de l'officier commandant président. 2° du plus ancien sous officier et 3° d'un sapeur pompier désigné par ses collègues.
Article 10. L'officier commandant prendra toutes les mesures et donnera tous les ordres relatifs au service ordinaire, aux revues, manœuvres et exercices, il devra au préalable nous en aviser.
Article 11. Les revues auront lieu le 1er dimanche d'avril et 1er décembre d'octobre de chaque année, jours de la sortie et rentrée de la pompe.
Article 12. Les manœuvres et autres exercices seront suspendus dans la saison rigoureuse de l'hiver, pour le reste de l'année, ils auront lieu le 1er dimanche de chaque mois à 5 heures du matin.
Article 13. La subdivision de compagnie escortera
le
Saint-Sacrement le jour de la Fête-Dieu. Elle sera
obligée d'assister
aux funérailles des autorités locales et autres
notabilités de la
commune. |
« La subdivision de compagnie escortera le Saint-Sacrement le jour de la Fête-Dieu... |
Article 14. Hors le cas d'incendie, revues, manœuvres, escortes et autres exercices prévus au présent règlement, aucun rassemblement ne pourra avoir lieu sans notre autorisation ou l'autorité supérieure suivant le cas.
Article 15. Le chef du corps devra obtempérer à notre réquisition, celle du préfet ou de l'autorité militaire, soit qu'il s'agisse d'organiser un service d'ordre ou d'honneur, soit de porter secours en cas d'incendie ou autre sinistre dans les limites ou hors les limites de la commune.
Article 16. En cas d'incendie, la direction et l'organisation des secours appartiendront à l'officier commandant ou sapeur pompier le plus élevé en grade, l'autorité locale conservera ses droits pour le maintien de l'ordre.
Article 17. Les peines disciplinaires seront pour les sous-officiers, caporaux et sapeur pompiers 1° la réprimande 2° la mise à l'ordre 3° un service hors tour 4° la privation totale ou partielle des avantages accordés aux sapeurs pompiers. 5° l'amende 6° la privation de grade 7° l'exclusion temporaire 8° la radiation définitive des contrôles.
Article 18 Les trois premières peines seront infligées par l'officier commandant, les autres le seront par le conseil d'administration.
Article 19. Tout sapeur pompier qui manquera sans excuse légitime, soit aux manœuvres du dimanche, soit aux exercices, escortes, revues et autres sera passible des amendes suivantes. Sapeurs pompiers : 0,50, caporaux : 0,75 ; sergents : 1. En cas d'incendie, l'amende ci-dessus sera augmentée de 0,50.
Article 20. Les amendes seront recouvrées par les soins du commandant de la subdivision ou par le plus ancien sous officier, elles seront versées dans la caisse municipale sous le titre de secours aux sapeurs pompiers. Le refus d'acquitter une amende imposée entraînera l'exclusion.
Article 21. Les sapeurs pompiers de tous grades seront exonérés de la prestation en nature pour leur personne seulement. Un crédit annuel spécial sera porté au budget suivant les modifications apportées par l'autorité préfectorale à la délibération du conseil municipal en date du 20 août 1876.
Article 22. L'uniforme sera obligatoire pour l'officier commandant et sera entièrement à sa charge, pour les sergents, caporaux et sapeurs pompiers, l'uniforme sera également obligatoire et sera fourni par la commune. Cet uniforme devra être conforme à l'habillement coiffure et équipement déterminé par le décret du 14 juin 1852.
Article 23. L'entretien de l'armement fourni par l'État sera à la charge des sapeurs pompiers, les réparations en cas d'accidents causé par le service incomberont à la commune seulement.
Article 24. Des secours pourront être accordés aux sapeurs pompiers de tous grades qui, dans le service, auront reçu des blessures ou contracté une maladie entraînant une incapacité de travail, en cas de mort, ces secours pourront être employés à venir en aide aux veuves et à leurs enfants. Ils seront prélevés sur les amendes créées par l'article 19 de ce règlement et, à leur défaut, sur les ressources communales affectées à cet effet par la délibération sus-visées.
Article
25. L'entretien, le chauffage et l'éclairage de
l'appartement tenant lieu de corps de garde, l'entretien de la pompe et
accessoires, les réparations et l'entretien des armes, sauf
recours contre les sa peurs pompiers dans le cas prévue par
le règlement, les frais de registres papiers et autres frais
de bureau seront à la charge de la commune. Fait
à Jumièges le 12 mars 1879. Le maire de
Jumièges. Chrétien.
Après le secrétaire général
de préfecture, le général approuva ce
règlement le 22 avril 1879.
Le 6 août 1882 Hippolyte Senard est
révoqué par décret. Le 20, le garde
champêtre alla lui porter copie. Le maire, M. Philippe, ne
nous dit pas quelles en sont les raisons. Il est remplacé
par Eugène Ybert par le décret du 29 septembre
1882
Le
8 août 1886, à 9h du matin, le conseil se
réunit en mairie, convoqué par l'adjoint, Sever
Boutard. Sont présents : Cabut
Vauquelin, Saunier, Gruley, Délogé et Vestu.
Excusés : MM Granchamp, maire, Delamettérie,
Renault. Absents : M. Lambert et Philippe,
décédé. Vauquelin est
secrétaire. M. le président expose au conseil :
1° que les tuyaux de la pompe sont crevés partout
et incapables de servir et qu'il n'est pas prudent de ne pas les
remplacer promptement.
2° que les pompiers n'ont pas de petite tenue ni aucun signe
distinctif dans un incendie, ce qui les fait confondre avec le fil, il
est d'avis qu'il y a lieu de leur donner à chacun une veste
en treillis et une ceinture de manœuvre. M. Granchamp
à offert de participer à la dépense
pour une somme de 100F. Le conseil à l'unanimité
adopte la proposition de M. le président et vote pour faire
face à la dépense afférente
à l'achat des tuyaux et de la petite tenue la somme de deux
cent quatre vingt francs qui sera prise sur les fonds libres du budget
communal.
C'est
à cette
époque que l'on entreprit la construction d'un abri pour la
pompe à incendie. Ce qui suscita une belle
polémique.
LIRE :
Le lieutenant Yvert
habitait Duclair depuis deux ans et avait de ce fait
démissionné. En
février 1889, un décret porte Lambert fils au grade de
sous-lieutenant de la compagnie. Le dimanche 8 mars, une
cérémonie l'intronise officiellement chef de corps.
Devant les pompiers en grande tenue, Boutard donne lecture du
décret nommant Lambert-Gosser lieutenant. Il répond par
des remerciements émus et la volonté de faire son devoir
de "soldat-citoyen". Une réunion confraternelle termine le tout
et tous les hommes applaudissent à la réorganisation de
leur subdivision.
Dimanche 26 octobre 1890. Richard Waddington préside le banquet des pompiers aux côtés de Boutard, maire et de son adjoint, Delametterie. Il y a là le lieutenant Lambert, Guéroult et Baptiste, les capitaines de Boscherville et Duclair, le conseil municipal. Le député à une pensée pour Grandchamp et porte aussi un toast à Sadie Carnot après avoir évoqué la situation du pays. Boutard trinque à la santé de Waddington, Lambert des pompiers du canton...
Les effectifs augmentent
Le
21 décembre 1890, on se réunit à 11
heures et
demi du matin. Autour de Boutard, on remarque Paumier, Lambert, Jeanne, Vauquelin,
Lafosse et Renault. Excusé : Delametterie. Absents :
Délogé, Cabut, Vestu et Gruley. Vauquelin est
secrétaire.
Le président donne lecture au
conseil d'une lettre du préfet en date du 2
décembre dernier relative à l'effectif de la
compagnie des sapeurs pompiers, lequel est supérieur
à celui fixé par arrêté
préfectoral du 28 août 1876. Le conseil sur la
proposition du maire fixe l'effectif de la compagnie des sapeurs
pompiers à 35 et prie le préfet de bien
vouloir adopter ce chiffre. Ces 35 hommes comprennent un
sous-lieutenant, deux sergents, quatre caporaux et un tambour ou
clairon.
le 8 novembre 1891 Le conseil se réunit sous la
présidence de Sever Boutard. Sont présents :
Delametterie, adjoint, Paumier, Cabut , Lambert, Vauquelin, Jeanne,
Lafosse et Renault. Absent : Vestu. Ce fut Vauquelin qui fit office de
secrétaire. M. le président donne lecture au
conseil d'une lettre des anciens pompiers par laquelle ils demandent un
crédit de 50F pour leur banquet de la rentrée. Le
conseil vote cette somme à prélever sur les fonds
libres.
Boutard
va
présider le centenaire de la République en
organisant une
fête conséquente. Le 22 septembre 1892,
l’affiche
est copieuse : salves d’artillerie, sonnerie de cloches,
revue de
la compagnie des sapeurs pompiers, promenade militaire, banquet public,
bal gratuit sur la place…
Le 16 octobre 1896, le conseil de Jumièges refusa de voter
une délibération de celui de Sotteville qui
voulait que les compagnies d'assurances contre l'incendie subviennent
à l'entretien des compagnies de sapeurs pompiers.
Sapeur pompier de Jumièges, Mazeau obtient une mention honorable pour 33 ans de service en août 1897.
La fête des pompiersLe
Journal de Rouen du 20 octobre 1897 relate ainsi la fête des
pompiers de Jumièges.
Jumièges. – La fête annuelle de la
Compagnie des sapeurs pompiers a eu lieu dimanche dernier.
Après une réunion à la mairie en vue
de l'organisation d'un tir gratuit en faveur des membres honoraires,
les sapeurs-pompiers ont pris rang sur la place publique et sont partis
en colonne, clairons et drapeau en tête, à la
rencontre de M. Maurice Lebon, député de la
circonscription, qui avait été invité
à présider le banquet.
La revue
passée par le sympathique député,
entouré du maire, M. Boutard et des membres du Conseil
municipal, a suivi cette promenade militaire.
A midi et demi, pompiers et invités se sont
réunis dans la salle de classe des garçons pour
prendre part au banquet servi par M. Littré, restaurateur.
Toutes les notabilités de la commune et des
délégués des communes environnantes y
assistaient.
Au champagne, M. Lebon s'est levé et a porté la
santé du chef de l'État, M. Félix
Faure, qui,
l'année dernière, visita Jumièges
où il fut reçu avec un patriotique et
enthousiaste élan. Il a rappelé ensuite les
derniers événements passés en Russie
et l'alliance entre les deux grands peuples. Se tournant ensuite vers
M. Boutard, M. Lebon a exprimé au
dévoué maire tout le plaisir qu'il
éprouvait de le voir sauvé d'une longue maladie,
puis il a porté la santé de M. Delametterie,
l'honorable adjoint et de M. Lefrançois.
En termes émus, M. Boutard a remercié M. Lebon,
il a félicité ensuite M. Lambert et la Compagnie
des sapeurs-pompiers pour leur dévouement dans les nombreux
incendies qui ont éclaté à
Jumièges depuis deux ans et à levé
son verre en l'honneur de M. le préfet de la
Seine-Inférieure.
Le lieutenant Lambert a remercié tous les invités
de leur présence à cette réunion
fraternelle et, en terminant, il a avec beaucoup d'humour
rappelé que l'équipement de sa Compagnie se
recommandait aux bons soins et à la sollicitude de la
municipalité.
Le sous-lieutenant Hamelin, au nom de la Compagnie de Duclair, a
remercié M. Lambert de son aimable invitation et a
été heureux de constater l'union qui existe entre
les deux Compagnie : « C'est de la vraie
fraternité républicaine. »
Les chanteurs se sont fait entendre ensuite. Tous les
invités se sont séparés,
enchantés de cette fête.
Emile Barbey fils, sapeur de Jumièges, se distingua en avril 1898. Il entend un jour une détonation et des cris d'enfants. Son intervention va les sauver d'une mort affreuse. Que s'est-il passé ? Un effroyable concours de circonstances. Louis Cadinot avait acheté dans une vente un lot d'outils et de ferrailles dans lequel se trouvait un canon de fusil démonté. Son fils de 20 ans voulut découper la culasse et, pour faciliter l'opération, il mit le canon à rougir dans le feu. Une explosion. Et une décharge lui transperça la jambe. Voyant le sang gicler, sa sœur se précipite pour lui comprimer l'artère. Quand elle réalise que ses propres vêtements sont enflammés. L'arrivée de Barbey fut providentielle.
On lit dans le Gaulois du 13 septembre 1898. "Une chapelle très ancienne, appelée la Mère-Dieu, située à 4 kilomètres de Duclair, dans la forêt de Jumièges, appartenant à M. Prat, a été la proie des flammes. Les pertes sont évaluées a 500 francs. La cause est accidentelle, elle est attribuée à plusieurs cierges allumés qui avaient été placés par plusieurs personnes venues le matin en pèlerinage, et qui auraient communiqué le feu aux objets déposés près de la statue de la Vierge."
Lambert, commandant de la compagnie, fut calomnié. Puis son détracteur... se rétracta et lui versa 10 F. Le lieutenant s'empressa de verser la somme à la caisse de Secours mutuels de la compagnie.
SOURCES
Archives départementales, documents numérisés par Jean-Yves et Josiane Marchand, transcription : Laurent Quevilly.